Juillet 1997 : l'éclatement de la crise asiatique

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13 novembre 1998

On peut dire aujourd'hui qu'un spectre hante le monde : celui de la crise financière.

C'est le cas en particulier depuis le début de ce que l'on a appelé la crise asiatique, le 2 juillet 1997. Ce jour-là en Thaïlande, à la suite d'attaques spéculatives, le gouvernement de ce pays du Sud-Est asiatique abandonnait la défense du cours de sa monnaie. Et dans les semaines et les mois suivants, on assistait à la multiplication des faillites, tandis que le gouvernement annonçait des plans d'austérité pour tenter de rétablir la situation.

Cette crise était contagieuse puisque, dès le 11 juillet 1997, le gouvernement des Philippines annonçait à son tour qu'il laissait filer sa monnaie face aux attaques spéculatives. La crise était plus brutale qu'en Thaïlande puisque la monnaie philippine perdait 12 % de sa valeur en quelques heures. Là aussi la Bourse s'effondrait, les faillites et les fermetures d'entreprises se multipliaient. Et la panique financière gagnait un autre pays, l'Indonésie.

Pendant que cette crise faisait tache d'huile, les institutions financières tentaient d'intervenir, en particulier la plus connue : le FMI, le Fonds Monétaire International qui est censé assurer, à l'échelle du monde, une certaine stabilité des changes permettant le bon fonctionnement du commerce. Le 20 août 1997, on apprenait ainsi que le FMI avait débloqué 3,9 milliards de dollars d'aide à la Thaïlande, dans le cadre d'un plan d'ensemble d'un total de 17 milliards de dollars. Cela fait partie du rôle de régulation que le FMI est censé jouer face aux désordres monétaires.

Cela n'empêche pas ses dirigeants de se distinguer par leur aveuglement, à commencer par son directeur Michel Camdessus, un Français qui fait une belle carrière de fonctionnaire international dans cette institution. Ainsi, le 21 août 1997, après l'annonce de ce plan de 17 milliards de dollars, il déclarait : "le pire de la crise est derrière nous"... Hélas, on apprenait le même jour que la banque centrale de Thaïlande avait déjà dépensé 23 milliards de dollars pour tenter de défendre sa monnaie, soit 35 % de plus que les crédits débloqués par le FMI. La spéculation redoublait. Quelques jours plus tard, les attaques se portaient sur les monnaies de Corée du Sud, de Singapour et de Hong-Kong.

Jusqu'à la fin 1997, on allait assister à l'effondrement de la plupart des monnaies de la région, les unes après les autres, sous les assauts de la spéculation, avec pour conséquence l'annonce de mesures d'austérité, de faillites et de fermetures d'entreprises. En même temps le FMI, en contrepartie des aides financières qu'il accordait, imposait aux différents pays du Sud-Est asiatique un contrôle sur leurs finances.

La crise n'était pas pour autant enrayée, et gagnait d'autres pays. Le 27 octobre 1997, la Bourse de New York enregistrait pour la première fois les conséquences de la crise asiatique avec une forte chute : plus de 7 % en une seule séance. Enfin, le 25 novembre, au Japon cette fois, c'était la faillite de Yamaichi, un des plus grands courtiers de la place financière de Tokyo.

Et puis, après un répit apparent au début de 1998, la crise a continué de plus belle avec l'écroulement de la monnaie russe au mois d'août dernier, suivie de la panique financière en Amérique latine, puis sur les places boursières européennes. Aujourd'hui, quinze mois après l'éclatement de la crise thaïlandaise, le fait le plus frappant n'est pas le caractère particulier de la crise dans le Sud-Est asiatique, c'est qu'une crise monétaire et boursière en Thaïlande se soit répandue d'abord dans toute la région, puis au Japon, puis en Russie, en Amérique latine, puis aux places financières occidentales, comme dans un gigantesque jeu de dominos. Certains peuvent dire que la faute en est au premier domino qui est tombé, à supposer qu'on puisse le situer. Mais le problème évidemment n'est pas là, il est dans la fragilité du système.