En juin 1992, un sommet de la Terre a été réuni à Rio de Janeiro, d'où les enfants de la rue avaient été brutalement chassés, et même assassinés au besoin, pour la circonstance. Plus d'une centaine de chefs d'Etat et de gouvernement étaient présents, ainsi que des industriels et plusieurs centaines d'organisations non gouvernementales, des milliers de journalistes et de participants divers. Le but était de réussir une grande opération consensuelle sous la bannière de la défense de la planète, étant donné que, malgré tout, 20 % de la population mondiale consomment à eux seuls 80 % des richesses ce qui reste une réalité embarrassante.
Le sommet de Rio a donc marqué l'intérêt officiel en faveur d'une politique de "l'environnement global". Parmi les menaces planétaires évoquées, il y eut celle qui plane sur la biodiversité, c'est-à-dire la diversité des espèces vivantes, en raison des risques accrus de disparition d'espèces animales et végétales. La convention qui fut signée sur ce sujet, après un long marchandage, donne aux Etats des pays sous-développés le droit de réclamer des redevances aux industriels qui mettraient au point un produit dérivé des ressources naturelles de leurs pays. Ils peuvent "confier" à de grandes entreprises privées, par contrat, le droit d'exploiter leurs ressources animales et végétales, à peu près comme ils ont "confié" si l'on ose dire aux trusts impérialistes l'exploitation de leurs matières premières minérales, leur pétrole par exemple.
Le Costa Rica a transformé le quart de son territoire en réserves naturelles, où la grande firme pharmaceutique américaine Merck prospecte et analyse des échantillons de plantes, de microbes et d'insectes (moyennant une compensation financière). Des contrats analogues existent entre des industriels européens et certains pays africains.
Toujours au nom du respect de la biodiversité, plusieurs Organisations non gouvernementales (ONG) "vertes" ont formulé des propositions convergeant avec celles des industriels. Ainsi, l'existence de la dette contraint bien des pays pauvres à brader leurs ressources naturelles pour rembourser. Des ONG de défense de l'environnement rachètent une partie de la dette à prix réduit. Les banques créancières y trouvent leur intérêt, car cela leur permet de minimiser leurs "pertes" sur des créances de toute façon irrecouvrables, et elles retirent des avantages fiscaux de l'opération.
On appelle cela les échanges "dettes-nature", et c'est une forme de troc pratiquée dans le milieu de la finance qui est appliquée à l'écologisme. A une époque où l'exploitation par l'impérialisme du monde sous-développé a pris une forme en grande partie financière, l'environnement naturel de ces pays est en train d'entrer dans un circuit de type boursier...
Evidemment, les pays d'Amérique latine, d'Afrique ou d'Asie n'ont pas les mêmes moyens pour imposer aux pays industrialisés, principaux pollueurs du monde, des conditions de protection de leur biodiversité... Et l'environnement est devenu une nouvelle sorte d'alibi pour une autre forme d'ingérence de la part des pays riches, "l'ingérence écologique" (l'expression est, paraît-il, de Michel Rocard).
L'environnementalisme et l'"écologie globale" font aujourd'hui partie de la panoplie des instruments de la domination économique de l'impérialisme sur le monde entier.