Israël-Palestine : la révolte des Palestiniens

Εκτύπωση
novembre 2015

Depuis la mi-septembre, les affrontements entre Palestiniens et soldats israéliens sont devenus quotidiens. Limités au début à la partie arabe de Jérusalem et à la question de l'accès à l'esplanade des Mosquées, ils se sont généralisés à l'ensemble de la Cisjordanie.

Depuis le début, le gouvernement israélien s'est engagé dans la voie d'une escalade de la répression : aggravation des peines de prison contre les « lanceurs de pierres », autorisation donnée d'user de tirs à balles réelles, déploiement de troupes en Cisjordanie. Pour la première fois, les autorités israéliennes ont organisé le bouclage des quartiers arabes de Jérusalem en installant des checkpoints, des points de contrôle, pratique réservée jusque-là aux villes de Cisjordanie. Une nouvelle étape a été franchie, dimanche 18 octobre, avec la construction d'un mur de deux mètres de haut destiné à séparer le quartier arabe de Jabal Moukabber, d'où sont originaires certains des auteurs des récentes attaques anti-israéliennes, du quartier de colonisation juive d'Armon Hanetsiv. Présenté comme provisoire, ce mur doit, à terme, atteindre trois cents mètres de long selon une porte-parole de la mairie de Jérusalem.

Mais face à l'aggravation de la répression, la mobilisation, loin de diminuer, n'a fait que s'approfondir, gagnant une partie de la jeunesse palestinienne. Aux groupes de jeunes lançant des pierres sur les militaires s'est ajoutée la vague d'attentats au couteau, créant de nouveau parmi la population juive de Jérusalem un climat d'insécurité qui rappelle la période de la précédente intifada (soulèvement), au début des années 2000.

Jour après jour, le nombre de victimes augmente : le 18 octobre, au moment où nous écrivons cet article, au moins 42 Palestiniens avaient déjà été tués et des centaines d'autres blessés, alors que du côté israélien on dénombrait sept morts et des dizaines de blessés.

Ces jeunes, étudiants, lycéens et même collégiens qui se mobilisent depuis plusieurs semaines expriment leur révolte face aux violences et aux humiliations subies quotidiennement dans les territoires occupés, et plus généralement, face au mépris et à l'arrogance dont témoigne le gouvernent israélien.

Un gouvernement israélien de plus en plus à droite

Depuis son arrivée au pouvoir en 2009 en tant que Premier ministre, Netanyahou a fait montre d'une intransigeance provocante vis-à-vis des Palestiniens et donné à sa politique un caractère particulièrement brutal. Rappelons qu'il y a un an, en août 2014, les opérations militaires israéliennes contre la bande Gaza ont fait plus de 2 000 morts et 11 000 blessés palestiniens.

En mai 2015, Netanyahou s'est allié aux partis les plus à droite pour parvenir à constituer son gouvernement. Deux partis ultra-orthodoxes, Shass et Judaïsme unifié de la Torah, y ont obtenu des ministères ainsi que le Foyer juif, dont l'un des dirigeants, Naftali Bennett, a été le porte-parole des colons de Cisjordanie. Il siège aujourd'hui dans le gouvernement israélien en tant que ministre de l'Éducation, aux côtés de deux autres membres de son organisation qui détiennent les portefeuilles de la Justice et de l'Agriculture. Plus encore que les précédents, ce gouvernement apparaît comme un « gouvernement des colons », autorisant la construction de centaines de logements dans les colonies juives autour de Jérusalem-Est et en Cisjordanie, expulsant des Palestiniens de leurs habitations déclarées illégales.

Résultat de cette politique de colonisation, selon l'ONU, les Palestiniens, au nombre de 300 000, seraient devenus minoritaires face aux 356 000 colons israéliens dans la zone C de la Cisjordanie, les 60 % de cette région restés entièrement sous contrôle administratif et militaire israélien. À ces colons s'ajoutent près de 200 000 autres, qui vivent dans différents quartiers de Jérusalem-Est.

Le terrorisme des colons

Bénéficiant d'une totale impunité, ces colons, multiplient les provocations et les agressions contre des Palestiniens. En juillet dernier, à Douma, dans le nord de la Cisjordanie, un attentat perpétré par des colons a provoqué la mort d'un bébé palestinien de 18 mois, brûlé vif. Cet acte était loin d'être isolé puisque, depuis le début de l'année, ce ne sont pas moins de 120 actes de violence « liés aux colons » qui ont déjà été recensés en Cisjordanie (Jérusalem-Est inclus) par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA). Ce terrorisme n'épargne pas les Juifs eux-mêmes : en août 2015, une jeune fille a été poignardée par un intégriste juif lors de la Gay Pride à Jérusalem.

Si le gouvernement de Netanyahou se montre l'un des plus à droite qu'ait connus Israël, il faut souligner que le Parti travailliste, aujourd'hui dans l'opposition, n'a pas mené une politique fondamentalement différente vis-à-vis des Palestiniens quand il était au pouvoir. Entre 1967 et 1979, les gouvernements travaillistes n'ont jamais cessé d'encourager la création de colonies en Cisjordanie, dont ils ont organisé l'occupation. Après la signature des accords d'Oslo en 1993 par le travailliste Rabin, prévoyant la création d'une Autorité palestinienne et présentés comme inaugurant un prétendu « processus de paix », le rythme de création d'implantations juives s'est encore accéléré.

Enfin, il faut souligner que Netanyahou se livre à une surenchère guerrière car il sait pouvoir compter sur le soutien indéfectible des grandes puissances, à commencer par celui des États-Unis, qui voient dans l'État israélien un des piliers de l'ordre impérialiste dans la région.

Ainsi, la révolte actuelle est le fruit de cette situation devenue insupportable à toute une partie de la jeunesse palestinienne. On ne peut qu'être totalement solidaire de sa lutte et il faut souhaiter qu'une partie de la population juive elle-même se refuse à continuer d'appuyer la politique de son gouvernement, qui la condamne à vivre dans l'insécurité et sous la menace d'une extrême droite de plus en plus omniprésente.

20 octobre 2015