Afghanistan : après des décennies de manœuvres impérialistes

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mars 2021

Vingt ans après le début de la guerre déclenchée contre l’Afghanistan par les États-Unis et la coalition des pays membres de l’Otan, dont la France, la guerre fait toujours rage dans ce pays. La population afghane continue de subir les bombardements, les attentats et les exactions des différentes armées, celles de l’Otan, celle du gouvernement dirigé par Ashraf Ghani mis en place par les États-Unis, celles des bandes armées des talibans qui aspirent à revenir au pouvoir dont ils ont été chassés en 2001, et bien d’autres.

Le 16 janvier dernier, à Kaboul, la capitale, deux policiers mouraient dans l’explosion d’une mine placée en bord de route. Le lendemain, deux femmes, des juges travaillant à la Cour suprême afghane, étaient assassinées en pleine rue dans la capitale. Le président afghan, Ashraf Ghani, et le chargé d’affaires américain à Kaboul, Ross Wilson, accusaient les talibans d’en être à l’origine. Mais les attentats se succèdent depuis des mois. Tous ne sont pas revendiqués par les talibans. On assiste à une recrudescence de ceux qu’ils commettent contre l’armée afghane. De son côté, celle-ci multiplie les bombardements aériens prétendument ciblés, qui font des dizaines de victimes civiles. Ainsi, le 9 janvier, dix-huit membres d’une même famille ont été tués par l’armée de l’air afghane dans le Sud. Selon la mission politique de l’ONU en Afghanistan, près de 300 civils ont été tués, et un nombre équivalent blessés, du seul fait des bombardements de l’aviation afghane, soit une augmentation de 70 % par rapport aux années précédentes. À cela s’ajoutent désormais les attentats de l’organisation État islamique (OEI) de plus en plus présente dans le pays depuis ses défaites en Irak et en Syrie. Début novembre 2020, vingt-deux étudiants étaient massacrés à l’université de Kaboul dans un attentat revendiqué par OEI.

Les centaines de milliers de morts de ces années de guerre, les sept millions de réfugiés, les innombrables destructions, constituent le tragique bilan des interventions et manœuvres de l’impérialisme depuis des décennies.

Quarante ans de guerre et de manœuvres impérialistes

L’Afghanistan, ce pays d’Asie centrale entouré par le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et la Chine au nord, le Pakistan au sud-est et l’Iran à l’ouest, est depuis bien longtemps au centre des tempêtes dévastatrices déclenchées par les rivalités entre grandes puissances. Ce fut le cas dès le 19e siècle, quand l’Afghanistan se retrouva dans la sphère d’influence de l’impérialisme britannique, contestée par la Russie tsariste. Ce pays coincé entre deux empires devint un État tampon, réduit à l’isolement dans le sous-développement. Ses frontières furent dessinées au gré des rapports de force entre ces grandes puissances, séparant des peuples à cheval entre différents pays limitrophes. Ainsi les Pachtounes, l’ethnie la plus nombreuse, sont aussi présents au Pakistan ; les Tadjiks et les Ouzbeks, qui vivent au nord du pays, sont également présents dans plusieurs pays d’Asie centrale. Les Hazaras sont d’origine mongole et de rite musulman chiite, comme les Iraniens. L’impérialisme ne manqua pas de jouer sur ces divisions.

À partir de 1947, date de l’indépendance de l’Inde et de la formation du Pakistan, le pays se retrouva dans l’orbite de l’URSS. Mais trente ans plus tard, le 27 décembre 1979, l’armée soviétique dut intervenir militairement pour empêcher le régime afghan prorusse de s’effondrer. Une guerre contre l’occupant commença alors, conduite par des moudjahidin, des seigneurs de guerre s’appuyant sur leur ethnie, voire leur tribu, et combattant au nom de l’islam. Ce fut le début de dix années de guerre. La brutalité de l’intervention de l’armée soviétique contribua à fournir des recrues aux bandes armées en rébellion, mais l’aide vint surtout d’ailleurs. Les États-Unis agirent en effet en sous-main, voyant là l’occasion d’affaiblir l’URSS.

Cette aide avait commencé avant l’intervention soviétique, avec l’ouverture de camps d’entraînement de moudjahidin au Pakistan. La CIA agit conjointement avec le Pakistan et l’Arabie saoudite pour renverser le gouvernement afghan soutenu par l’URSS. Elle finança des camps d’entraînement et l’armement de ces guérillas des plus intégristes, comme celle d’Hekmatyar, le chef d’un des nombreux partis islamistes, le Hezb-i-Islami. John Gunther Dean, alors ambassadeur des États-Unis, témoigne ainsi de la situation dans les années 1980 : « Avec l’Arabie saoudite, les États-Unis ont contribué au financement des volontaires de nombreux pays pour faire pression sur l’Union soviétique. Lors de mon séjour en tant qu’ambassadeur américain en Inde, j’ai passé des messages du président Reagan au président Gorbatchev de l’Union soviétique via le Premier ministre indien, Rajiv Gandhi, […] pour obtenir la mise en place d’un gouvernement successeur acceptable à Kaboul. […] Les États-Unis et l’Arabie saoudite ont soutenu Gulbuddin Hekmatyar pendant la guerre antisoviétique, mais lui et ses combattants se sont retournés, au fil du temps, en adversaires acharnés des États-Unis. »[1]

Ce ne furent pas les seules forces entretenues par l’impérialisme qui se retournèrent contre leurs anciens maîtres. Un certain Oussama ben Laden, missionné par les services secrets de son pays, l’Arabie saoudite, construisit durant la même période un réseau, avec des djihadistes venant des différents pays musulmans, dont le Pakistan, pour former dès 1987 al-Qaida, responsable des attentats du 11 septembre 2001.

Le 4 avril 1988, un accord fut finalement signé à Genève entre le dirigeant russe, Mikhaïl Gorbatchev, et le gouvernement « acceptable » de Najibollah, sur le retrait des troupes soviétiques, qui fut effectif le 15 février 1989. Mais le pays continua à être la proie des affrontements entre les différentes bandes armées dirigées par les seigneurs de guerre qui avaient combattu l’armée soviétique et aspiraient désormais au pouvoir. Les rivalités entre puissances régionales continuèrent d’attiser ces conflits. Les ethnies afghanes ayant des liens avec un ou plusieurs pays voisins servirent de base à des milices financées par des puissances régionales au gré de leurs intérêts. Le Pakistan, un des principaux soutiens locaux de l’impérialisme, est là pour l’illustrer. Cet État qui abrite la plus grande partie de l’ethnie pachtoune, l’autre se trouvant de l’autre côté de la frontière afghane, considère l’Afghanistan comme sa zone d’influence, qu’il défend bec et ongles contre les visées de l’Inde.

Ces années de guerre civile aboutirent en 1996 à l’arrivée au pouvoir des talibans, des milices de jeunes étudiants en religion, d’origine pachtoune, organisées et armées par le Pakistan. L’impérialisme américain salua leur arrivée au pouvoir comme l’annonce d’un rétablissement de l’ordre dans le pays. Le Washington Post, journal proche du parti du président d’alors, Bill Clinton, parla de « la meilleure occasion qu’on ait connue depuis longtemps de mettre un terme à l’anarchie qui accule l’Afghanistan à la ruine, depuis l’invasion soviétique de 1979 ». Peu importait à ces commentateurs que les talibans imposent un régime de terreur.

Des possibilités nouvelles s’ouvraient alors sur le plan économique pour l’impérialisme. Avec la fin de l’URSS, en 1991, il devenait possible d’accéder aux richesses des anciennes républiques soviétiques, dont trois sont limitrophes de l’Afghanistan. Les projets de gazoducs, d’oléoducs, entre autres, aiguisaient les appétits des groupes capitalistes. Les énormes réserves de gaz naturel du Turkménistan, au quatrième rang mondial avec 10 % des réserves, et celles de pétrole du Kazakhstan intéressaient depuis longtemps des compagnies telles que l’américaine Unocal ou la saoudienne Delta Oil.

« Ces gars [les talibans] n’étaient pas les pires, des jeunes gens un peu fougueux, mais c’était mieux que la guerre civile. Ils contrôlaient tout le territoire entre le Pakistan et les champs de gaz du Turkménistan. Peut-être pensions-nous que c’était une bonne idée parce que nous pourrions ainsi construire un gazoduc à travers l’Afghanistan et amener le gaz et les sources d’énergie au nouveau marché. Donc tout le monde était content », explique Michael Beaton, responsable de la CIA sur le terrain afghan pendant la guerre contre l’occupation soviétique.[2] Acheminer gaz ou pétrole jusqu’aux marchés occidentaux en traversant l’Afghanistan et le Pakistan était désormais envisageable. Les États-Unis pouvaient dès lors espérer desserrer un peu leur dépendance des monarchies pétrolières du Golfe persique et casser le monopole russe sur le transport d’énergie dans la région.

Ce fut le cœur du projet de la compagnie américaine Unocal, dont Zalmay Zhalilzad, l’actuel négociateur de Doha, était le consultant dans les années 1990. À travers sa filiale Central Asia Gas (CenGas), cette société californienne chercha à construire un pipeline en Afghanistan. En 1997, avec le soutien actif du gouvernement Clinton et des services secrets pakistanais, Unocal avait pris contact avec le régime taliban alors au pouvoir. Avec un peu de chance, pensait-on alors à Washington, les talibans pouvaient être des partenaires aussi acceptables que les Saoudiens. Les attentats terroristes meurtriers contre les ambassades américaines en Tanzanie et au Kenya, organisés en 1998 par al-Qaida, dont le chef ben Laden avait été protégé par les talibans, mirent fin à ces espoirs. L’insécurité s’installait et allait décourager les Majors de l’énergie mondiale d’investir dans de tels projets, même s’ils ne furent jamais totalement abandonnés.

Le 11 septembre 2001, les attentats contre le World Trade Center à New York firent de nouveau basculer l’Afghanistan dans la guerre. Les États-Unis, soutenus par les pays de l’Otan, dont la France, lancèrent une offensive contre les talibans appelée avec cynisme Opération Liberté immuable. Sous prétexte de donner la chasse à ben Laden et aux forces rescapées d’al-Qaida, ou encore au mollah Omar, l’ex-leader taliban, des villages entiers furent réduits en poussière. En cinq semaines, le régime des talibans fut anéanti au prix de milliers de morts parmi les civils et de la destruction du pays. Un gouvernement et un président par intérim, Hamid Kar­zai, un ancien collaborateur de la CIA, arrivèrent dans les fourgons américains. Ce pouvoir fantoche ne pouvait guère tenir le pays sans la présence des troupes de l’Otan. Ce qui ne devait être qu’une guerre éclair se transforma en une très longue occupation par des dizaines de milliers de soldats américains, anglais, français ou originaires d’autres pays de la coalition de l’Otan.

Vingt ans plus tard, les États-Unis sont toujours englués dans ce conflit. Ils sont prêts aujourd’hui à s’entendre avec leurs anciens ennemis, lesquels avaient été leurs amis dans les années 1990. L’impérialisme est coutumier de ces alliances changeantes, mais cette option semble bien peu viable car, au fil des années de guerre, les groupes djihadistes de différentes obédiences, tout comme les différentes bandes armées ou mafieuses, ou les deux, se sont encore multipliés. Début février le Pentagone estimait qu’al-Qaida s’était réimplanté durant l’année 2020 en Afghanistan, en s’appuyant notamment sur les réseaux talibans. Les services du Trésor américain chargés de lutter contre le financement du terrorisme estiment, dans un rapport officiel, qu’en 2020 al-Qaida a « repris des forces en Afghanistan grâce à la protection des réseaux talibans, voire en combattant à leurs côtés »[3]. Les djihadistes de l’organisation État islamique, que les talibans disent combattre, semblent eux aussi avoir repris des forces sur leur nouveau terrain de combat afghan.

Les États-Unis embourbés dans la guerre

Cette guerre est un échec pour l’impérialisme américain, payé notamment par ses soldats : entre octobre 2001 et octobre 2018, 2400 militaires sont morts en Afghanistan. Mais il est encore plus chèrement payé par les civils afghans. Le coût de ces vingt années de conflit a de quoi donner le vertige. Il s’élevait déjà en 2018[4] à 900 milliards de dollars, soit davantage que le plan Marshall d’après la Deuxième Guerre mondiale. L’armée américaine a passé plus de jours en Afghanistan que lors de ses engagements cumulés dans les deux guerres mondiales et dans la guerre de Corée.

L’impérialisme américain cherche depuis des années à sortir du bourbier dans lequel il s’est enlisé. Ce qui le préoccupe n’est pas que les bandes armées afghanes continuent à s’entretuer, mais que l’instabilité afghane s’étende à toute la région. Si les talibans n’ont qu’un projet national, imposer un émirat basé sur la charia, il n’en est pas de même d’al-­Qaida et de l’organisation État islamique.

En 2003, le secrétaire d’État à la Défense, Donald Rumsfeld, annonçait déjà « la fin des opérations de combat majeures »[5]. Sept ans plus tard, l’effectif militaire atteignait 100 000 soldats. En novembre 2009, après avoir envoyé 30 000 soldats supplémentaires en Afghanistan, Barak Obama déclarait vouloir mettre un terme aux « guerres éternelles », promettant un retrait définitif des troupes américaines pour 2014. Plus de six ans plus tard, 2 500 soldats américains sont toujours présents dans le pays, sur un total de 9 600 soldats des États membres de l’Otan. À cela, il faut ajouter tout le personnel qui fait fonctionner les bases militaires et la présence de plus en plus importante de contractors. Ce sont des mercenaires encadrés par d’anciens officiers américains, qui sont embauchés par des sociétés privées telles que l’ex-Blackwater, DynCorp, Kellogg Brown & Root, filiale d’Halliburton, un marché qui est évalué à 70 milliards d’euros par an.

Arrivé au pouvoir, Donald Trump fit la même promesse que ses prédécesseurs : « Ramener nos gars à la maison. » En 2018, des négociations commencèrent entre le représentant des États-Unis, Zalmay Khalilzad, et celui des talibans, le mollah Abdul Ghani Baradar, un des fondateurs du mouvement taliban, arrêté à Karachi au Pakistan en 2010 et libéré de prison pour l’occasion à la demande des dirigeants américains. Le gouvernement officiel d’Ashraf Ghani n’était pas convié aux discussions, ce qui en dit long sur son peu de poids aux yeux des dirigeants américains. Finalement, des mois plus tard, le 29 février 2020 à Doha au Qatar, Trump annonçait qu’il était parvenu à un accord avec les talibans.

Selon ce prétendu accord de paix, en échange du départ définitif des troupes américaines au 1er mai 2021, les talibans s’engageaient à accepter un cessez-le-feu et à participer à des pourparlers avec le gouvernement afghan. Ils devaient enfin promettre de couper les ponts avec les organisations terroristes comme al-Qaida, une promesse qui ne peut être tenue tant les différents réseaux s’entremêlent. Pour ne donner qu’un exemple, le numéro deux de la direction des talibans, Seraj Haqqani, fils de Jalaluddin Haqqani, un ancien chef du réseau terroriste du même nom, joue le rôle d’interface d’al-Qaida au sein de cette direction. Il prolonge ainsi le rôle joué par son père aux côtés du mollah Omar, qui avait offert à Oussama ben Laden la possibilité d’installer la première base d’al-Qaida en Afghanistan. L’engagement à un cessez-le-feu fut rompu dès le 1er mars 2020, jour où les talibans reprirent les combats. Le site américain Long War Journal recensa 147 attaques dans 27 des 35 provinces, commises entre le 1er et le 10 mars. Elles épargnaient les forces armées étrangères, seul engagement tenu par les talibans.

Six mois plus tard, en septembre 2020, s’ouvraient cependant des discussions entre représentants des talibans et du gouvernement afghan, dans le but de trouver une sortie de crise. Mais ce prétendu « processus de réconciliation inter­afghane » est toujours au point mort. Les talibans se sentent en position de force face au gouvernement d’Ashraf Ghani, qui ne contrôle que Kaboul et les alentours mais ne veut rien céder. Les violences continuent, et les négociations en cours entre le gouvernement afghan et les talibans y contribuent. Les talibans jouissent d’une supériorité militaire face à une armée afghane exsangue et minée par la corruption et les désertions. Aussi renforcent-ils leurs attaques sur le terrain pour montrer leur force. Le chef des Renseignements afghans attribuait ainsi aux talibans la responsabilité de 18 000 attaques pour la seule année 2020.

Joe Biden dès son intronisation a parlé de revoir l’accord signé il y a un an et d’envisager un report du départ de l’armée américaine si le niveau de violences ne diminue pas. « Les talibans doivent faire davantage pour respecter les termes de l’accord de paix », déclarait le 15 février le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg. C’est évidemment un vœu pieux.

Le mirage d’un règlement politique

Malgré ses diverses tentatives, l’impérialisme américain se heurte toujours au même problème. Il n’a pas d’interlocuteur suffisamment solide pour espérer une stabilisation politique. Son objectif n’est pas de protéger la population, de soutenir les droits des femmes, comme le prétend sa propagande. Sous les gouvernements mis en place par les États-Unis, celui d’Hamid Karzai ou d’Ashraf Ghani, les femmes ont certes vu leur situation s’améliorer, un peu et seulement dans les villes. Mais, pour l’immense majorité de la population, ces gouvernements fantoches n’ont stabilisé que la misère. La solution politique à laquelle aspire l’impérialisme est celle qui pourrait permettre d’ouvrir aux multinationales de nouveaux marchés, de nouvelles possibilités de piller cette partie de la planète. Certes, le marché de la guerre se porte on ne peut mieux. Les États-Unis y ont dépensé des centaines de milliards, qui ont enrichi les marchands d’armes et les sociétés embauchant des mercenaires. Mais nombre d’autres projets restent en suspens, comme celui déjà cité du gazoduc TAPI qui traverserait le Turkménistan, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde.

Le 3 janvier dernier, le représentant spécial des États-Unis pour la réconciliation en Afghanistan, l’ambassadeur Zalmay Khalilzad, entamait une tournée en Afghanistan, au Pakistan, au Qatar et au Turkménistan, avec comme objectif d’exhorter les pays à poursuivre « des plans d’extension de la connectivité régionale, du commerce et du développement, qui seront aidés par un accord de paix afghan et aideront à maintenir la paix », pour reprendre une déclaration du département d’État.[6] Début février, une délégation talibane effectuait une visite à Achgabat, au Turkménistan, afin de promettre son soutien à la construction du gazoduc à travers l’Afghanistan, visite très probablement arrangée par les États-Unis. Suhail Shaheen, membre de l’équipe de négociation des talibans basée au Qatar, déclarait aux journalistes que son mouvement offrait « un soutien total pour la mise en œuvre et la sécurité du TAPI, et d’autres projets de développement dans notre pays ». Il n’est pas certain cependant que ces déclarations d’intention suffisent à rassurer d’éventuels investisseurs, ni même le gouvernement turkmène lui-même, tant le règlement politique continue d’être un mirage. Les manœuvres n’en continueront évidemment pas moins.

S’appuyer sur les forces les plus réactionnaires, attiser les rivalités entre puissances régionales, c’est de cette manière que l’impérialisme a toujours agi pour tenter de maintenir sa domination. De l’Irak à la Syrie jusqu’en Afghanistan, on en voit le résultat : le chaos s’étend toujours. La population afghane quant à elle est prise au piège entre la dictature de l’impérialisme américain, au travers du gouvernement vénal et corrompu d’Ashraf Ghani et de la présence de ses forces armées, les talibans, qui imposeraient une fois au pouvoir le même régime despotique qu’en 1996, et d’autres forces tout aussi réactionnaires. En finir avec cette situation implique de se mesurer avec tout un système de domination, dans lequel se combinent les interventions de l’impérialisme, des classes dominantes locales et de milices agissant de façon autonome. Abattre ce système ne pourra se faire que sur la base d’une politique révolutionnaire, prolétarienne et internationaliste, en en faisant l’objectif commun des masses exploitées de toute la région.

22 février 2021

 

[1]     Cité dans « Les crises en Afghanistan depuis le 19e siècle », Irsem, avril 2010.

 

[2]     Émission Pièces à conviction, France 3, 18 octobre 2001, cité dans le Monde diplomatique, janvier 2002.

 

[3]     Le Monde, 29 janvier 2021.

 

[4]     Le Monde diplomatique, avril 2019.

 

[5]     Cité dans La Croix, 13 février 2021.

 

[6]     eurasia.net, 6 février 2021, et The Diplomat, 9 février 2021.