Interventions de groupes invités (extraits)

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décembre 2020-janvier 2021

Nous publions ci-dessous de larges extraits des interventions des groupes invités. Nos lecteurs peuvent retrouver leurs organes de presse respectifs sur Internet (voir en quatrième de couverture, ou à partir du site de l’Union communiste internationaliste https://www.union-communiste.org/fr).

Combat ouvrier (Martinique et Guadeloupe)

De tous les départements français, c’est la Guadeloupe qui a été tour à tour la plus touchée en septembre et la moins touchée en octobre. En Martinique, il n’y a pas eu de pic d’alerte maximale mais, comme partout, les hôpitaux manquent de matériel et de personnel. La Martinique a été reconfinée partiellement comme l’Hexagone. Mais la tendance est aujourd’hui à la baisse.

Une « brigade » de médecins cubains est venue en Martinique du 26 juin au 9 octobre. Il aura fallu de longues démarches administratives pour cela. En Guadeloupe, pour l’instant, l’ARS et le gouvernement s’opposent à l’arrivée de ces médecins cubains. C’est à croire que le gouvernement craindrait encore, comme dans les années 1960 et 1970, une guérilla castriste.

Pas de médecins cubains donc, mais un appel officiel a été lancé aux médecins étrangers sachant parler français, aussi bien dans les hôpitaux qu’en médecine de ville, et aussi à tous les personnels soignants.

Comme dans l’Hexagone, le manque de personnel est criant, alors qu’il y a tant de chômeurs ! Et il est scandaleux que, dans une telle situation, des infirmiers se voient refuser leur demande d’embauche, au CHU de Pointe-à-Pitre par exemple, alors même que le directeur du CHU lançait un appel à l’embauche… Sans doute se disait-il : « Pourvu que personne ne réponde. »

Pendant cette crise sanitaire, depuis le mois de mars, nous avons été confrontés aux mêmes problèmes généraux qu’en France. À ceci près qu’il y a toujours un coefficient d’aggravation sociale aux Antilles en raison de l’importance du chômage qui y sévit. Le taux oscille toujours entre 25 % et 30 %.

Ce qui aggrave aussi la crise sanitaire aux Antilles, c’est que l’épidémie de Covid-19 se double d’une épidémie de dengue, une maladie sévère qui a causé plusieurs morts. Mais la tendance à la baisse de cette épidémie se confirme aussi depuis quelques jours.

Autre facteur d’aggravation de la situation : les pannes d’eau courante, surtout en Guadeloupe. En plein Covid, quand le lavage fréquent des mains est essentiel, ces coupures sont scandaleuses. Elles provoquent la fermeture soudaine d’écoles, et une angoisse accrue de la population des quartiers. Et quand l’eau coule, elle est insalubre. On y retrouve du mercure, du chlordécone, ou des souillures diverses. Encore la semaine dernière, dans la commune de Gourbeyre, les habitants ont été privés d’eau car les taux de chlordécone étaient trop élevés.

Beaucoup de gens achètent maintenant de l’eau minérale, ce qui équivaut à payer une taxe supplémentaire sur l’eau.

Les plus pauvres boivent l’eau courante quand il y en a, malgré les conséquences néfastes pour leur santé.

Beaucoup de gens refusent de payer pour l’eau courante – enfin, de moins en moins courante – et ils ont bien raison.

La raison principale des coupures d’eau est l’extrême vétusté du réseau. Nous l’avons déjà évoquée à un précédent congrès, mais le problème n’est pas réglé. 60 % de l’eau est perdue du fait de milliers de fuites. Il y a bien des tentatives de réparation mais c’est mettre des rustines. Un surpresseur neuf fait parfois des trous dans les tuyaux. En réalité, il faudrait refaire tout le réseau. Le coût se chiffre à un milliard environ, que l’État refuse d’engager. En Martinique, la situation est moins grave, malgré des problèmes d’acheminement de l’eau dans le centre et le sud de l’île pour une histoire de terrain privé.

Concernant la crise sanitaire, comme en France, le gouvernement et le patronat l’utilisent contre les travailleurs et en faveur du grand patronat.

Sur les 100 milliards d’euros du plan de relance du gouvernement, seul un petit milliard et demi a été attribué aux outre-mers.

En y ajoutant les divers montants d’argent public attribués aux outre-mers depuis le début de la crise, le montant injecté s’élève à 5,5 milliards.

Sur ces 5,5 milliards, il faut compter :

- 425 millions au titre de l’aide aux entreprises pour le chômage partiel,

- 456 millions de charges fiscales et sociales reportées des entreprises,

- 333 millions issus du fonds de solidarité aux entreprises,

- 2,6 milliards de garanties accordées par l’État pour des prêts aux entreprises, les PGE (prêt garanti par l’État).

Au total 3,8 milliards pour les entreprises. Et c’est surtout le grand capital qui en profite.

Le groupe de Bernard Hayot (groupe GBH), le plus riche béké des Antilles et de la Caraïbe, a obtenu un prêt garanti par l’État de 115 millions d’euros. Il n’en avait pas besoin mais a profité de l’aubaine. Et c’est le cas pour beaucoup de capitalistes.

Sur les 2,43 milliards du budget du ministère des outre-mers pour 2021, 66 %, soit 1,6 milliard, financera la compensation des exonérations de cotisations sociales patronales auprès de la Sécurité sociale.

Beaucoup d’argent donc de l’État pour le grand patronat. La population n’a que les miettes. Les travailleurs sont victimes de baisses de salaire et de licenciements.

Le patronat reçoit aussi beaucoup d’argent des collectivités locales. Il aura suffi que le patronat menace de bloquer toute la Guadeloupe pour que le conseil régional verse 30 millions d’aides d’urgence. Et un plan de relance régional de 500 millions a été voté pour lui.

En Martinique, la Collectivité territoriale, la CTM a décidé de donner – il s’agit bien de donner – 80 % de leur chiffre d’affaires aux entreprises pour le mois de novembre et 50 millions en tout pour faire face à l’urgence.

Certes des petits artisans, de tout petits patrons, profiteront de ces aides. Mais ce sont les plus grosses entreprises qui en profiteront le plus.

La crise frappe durement les travailleurs et les classes populaires

Sur l’ensemble des deux îles, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de 7 540, soit 8 %, entre le premier et le deuxième semestre 2020, sur une population d’environ 740 000 personnes. La précarité et la pauvreté augmentent en flèche.

On comptait au deuxième trimestre 670 licenciements. Rapporté à l’Hexagone, ce chiffre serait environ de 61 000. De ce point de vue, oui, il doit y avoir égalité sociale entre métropole et outre-mer.

Déjà en temps normal, 23,5 % de la population totale des deux îles perçoivent le RSA. Ce qui est considérable. Depuis le premier confinement, 6 900 personnes supplémentaires se sont inscrites au RSA. En Guadeloupe, 1 000 personnes supplémentaires s’y ajoutent chaque mois. D’ailleurs, les départements d’outre-mer viennent en tête des départements en proportion de personnes couvertes par le revenu de solidarité active.

Face à cette situation, il n’y a pas, ou pas encore de luttes offensives des travailleurs. Mais il y a des grèves qui montrent qu’une minorité de travailleurs ne désarme pas et garde le moral.

Les luttes

Quatre grèves récentes ont été victorieuses. Celle des éboueurs de Martinique, fin octobre, et de la société Nicollin à Basse-Terre en Guadeloupe. Les employés du Crédit agricole en Guadeloupe aussi ont gagné pour l’instant leur lutte contre les heures supplémentaires et la suppression de certains congés que voulait leur imposer la direction. Dans le secteur de la banane, sur l’habitation Case Paul en Martinique, la grève fut également victorieuse et une bonne partie des jours de grève a été payée.

Par ailleurs, dans les deux îles, les agents hospitaliers, durement frappés par la crise sanitaire, ont montré leur mécontentement de différentes manières, par des réclamations à la direction ou par des grèves. À l’hôpital de Trinité en Martinique, les agents ont fait grève pour réclamer le respect de l’engagement de reconstruction de cet hôpital, les ambulanciers du centre hospitalier universitaire de Martinique (le CHUM) ont aussi déclenché un mouvement, ainsi que ceux d’un centre de santé polyvalent.

En Guadeloupe, au CHU et dans le service de radiologie, les agents hospitaliers se sont mis en grève en octobre. Grâce à cette mobilisation, ils ont obtenu que onze manipulateurs radio soient titularisés sur les quinze contractuels du service.

La colère gronde dans les services hospitaliers et particulièrement aux urgences. Et tout dernièrement la colère a doublé car la direction a fermé le service d’urgence cardiologique du CHU de Guadeloupe, privant de ces urgences au moins 2 000 personnes cardiaques recensées.

Il y eut aussi la grève des commerciaux de chez Peugeot en Martinique, après le licenciement d’un des leurs.

En Guadeloupe, les travailleurs d’Antilles sûreté ont effectué 54 jours de grève. Il s’agit des agents de sûreté de l’aéroport, qui vérifient les bagages cabine à l’entrée des salles de départ. Ces travailleurs ont dû reprendre le travail sans avoir obtenu satisfaction. Mais la tête haute et très fiers de leur grève et de leur expérience de lutte, très fiers aussi de leur comité de grève élu.

Le 4 novembre, des agents municipaux de Sainte-Rose se sont mis en grève pour dénoncer le retard de paiement de leur salaire.

Sur les plantations de bananes, les ouvriers, déjà durement exploités en temps normal, voient leurs conditions de travail encore plus dégradées depuis l’épidémie. Dans les hangars de conditionnement de la banane, il est impossible de maintenir les distances sociales et le masque est inadapté aux efforts physiques intenses des ouvriers. Les planteurs exigent aussi que les salariés travaillent plus longtemps sans payer les heures supplémentaires : par exemple une journée de travail peut commencer à 6 heures pour finir à 17 heures. Sur les plantations, des groupes d’ouvriers, qui n’ont pas perdu leur combativité depuis leur grande lutte de 2017, s’organisent pour résister face aux gros planteurs.

Ces gros planteurs en revanche ont obtenu de Bruxelles le maintien de leurs subventions du « programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité » (POSEI), l’outil de mise à disposition d’aides européennes et nationales au secteur agricole pour toutes les régions ultra-périphériques de l’Europe (RUP). Pour les gros planteurs, cela représente des millions chaque année.

Une autre grève a été déclenchée en Martinique sur l’habitation Bamaryl, au François, propriété du groupe béké Bernard Hayot, contre des sanctions infligées à trois travailleurs.

Quant au scandale du chlordécone, il a fait l’actualité en continu.

Les protestations contre l’empoisonnement des îles par ce pesticide se poursuivent et prennent de l’ampleur, surtout en Martinique. Le 7 novembre dernier un grand rassemblement antichlordécone eut lieu à Fort-de-France. Il était organisé par le lyannaj pou dépolyé Matinik, « alliance pour dépolluer la Martinique ». Une autre manifestation s’est déroulée à Trinité la semaine dernière.

Combat ouvrier fut à l’initiative de trois meetings et d’une manifestation après l’assassinat de George Floyd, auxquels se sont jointes d’autres organisations. Des centaines de personnes y ont participé.

Concernant les élections municipales, cette année, nous avons constitué trois listes : à Fort-de-France, aux Abymes et à Capesterre-Belle-Eau. À Fort-de-France, où la camarade tête de liste était une ouvrière agricole de la banane, nous avons obtenu 215 voix et 1,49 %. Aux Abymes, 2 347 voix et 1,40 % ; à Capesterre, 431 voix et 6,40 %. À Capesterre, des ouvriers de la banane constituaient la liste. Ils ont pris la campagne en main du début jusqu’au dépouillement et furent assesseurs et délégués dans tous les bureaux de vote de la commune. Ils ont aussi organisé un repas de soutien pour faire face aux dépenses électorales.

Nous nous présenterons aussi aux élections régionales et départementales prochaines.

On note par ailleurs une petite réapparition de groupes et organisations nationalistes qui font un peu reparler d’eux. Et, chose inhabituelle, la presse officielle leur consacre parfois des encarts. Un film sur l’un des fondateurs du mouvement nationaliste de Guadeloupe a été projeté à la télé officielle à deux ou trois reprises. Plusieurs militants nationalistes en vue furent interviewés à l’occasion de la mort d’un militant activiste des années 1980.

En Martinique, les jeunes activistes nationalistes se sont signalés par le déboulonnage de statues. Ils commencèrent par Victor Schœlcher et cela fit grand bruit. Nous avons diffusé largement un texte pour donner notre point de vue de communistes révolutionnaires sur cette action, sous le titre : Mauvais geste, saine colère.

On appelle ces jeunes activistes les « rouge-vert-noir », du nom des couleurs du drapeau indépendantiste. Ils continuent à occuper des supermarchés appartenant à des békés pour protester contre l’empoisonnement des terres au chlordécone. Ils réclament aussi des indemnisations par l’État et les békés responsables de ce désastre écologique et sanitaire. C’est dans le cadre de leurs actions de protestation que le jeune Kéziah Nuissier a été battu par les gendarmes et a été victime d’insultes racistes. Le 9 novembre dernier, son procès a été reporté au mois de mars sur la demande de ses avocats. Une manifestation de 300 personnes en soutien à Kéziah a été organisée ce jour-là aux abords du palais de justice de Fort-de-France. Nous y avons participé.

Ces jeunes sont liés peu ou prou à une organisation nationaliste indépendantiste, le PKLS (Parti communiste pour l’indépendance et le socialisme) issu, il y a longtemps, d’une scission du Parti communiste martiniquais.

Pour l’instant, en Martinique comme en Guadeloupe, ces petits groupes nationalistes ne génèrent ni large approbation ni rejet de la population.

Le fait nouveau est qu’ils ont un peu plus aujourd’hui les honneurs de la presse officielle, c’est-à-dire du quotidien local France-Antilles et de la télé officielle, Guadeloupe Première et Martinique Première. C’est un changement notable. Quelle en est l’explication ? Difficile à dire. Peut-être ne font-ils plus peur du fait de leur faiblesse, leur modération et leur peu d’influence dans la population ; peut-être les idées d’autonomie ou d’indépendance ne sont-elles plus l’épouvantail qu’elles étaient, peut-être y a-t-il entre les milieux nationalistes et ceux du pouvoir des tentatives de rapprochement, peut-être aussi tout simplement les journalistes n’avaient-ils pas grand-chose à se mettre sous la dent. Ou peut-être est-ce tout cela à la fois. L’avenir le dira.

C’est une raison de plus pour notre petit groupe de continuer à propager les idées communistes révolutionnaires parmi les travailleurs, et les classes populaires. C’est dans ce sens que nous avons organisé une conférence de presse le 7 novembre dernier et diffusé largement un tract sur nos positions en tant que communistes révolutionnaires par rapport à la situation générale mais aussi par rapport aux nationalistes. D’autant que les périodes de confinement, reconfinement et autres restrictions ont limité nos apparitions publiques depuis le premier tour des élections municipales. Une longue interview de notre camarade Jean-Marie Gabriel qui conduira la liste CO aux régionales a été publiée dans France-Antilles.

Nos jeunes camarades ont organisé leur prochaine réunion publique à l’université sur le thème suivant : Guadeloupe-Martinique, quelle solution : nationalisme ou communisme révolutionnaire ? Nous distribuons depuis une semaine un tract massivement dans les deux îles sur nos positions générales.

Organisation des travailleurs révolutionnaires (OTR, Haïti)

Depuis la pandémie de Covid-19, aucun vol français ne se pose sur le sol haïtien sauf lorsqu’il s’agit de jeter hors de la Guadeloupe des travailleurs sans-papiers. Il y a dix jours, un avion fut spécialement affrété à cet effet.

La pandémie de Covid-19 n’a pas fait autant de dégâts en Haïti qu’aux Amériques ni même qu’en Europe, malgré les modèles qui prédisaient des scènes d’apocalypse pour les classes populaires, avec des centaines de milliers de morts, des millions de personnes infectées. En effet, vu leurs conditions de vie dans les bidonvilles, faites de malnutrition, d’insalubrité et de promiscuité, et vu la grande virulence du Covid, ces populations auraient eu du mal à se protéger en observant les gestes de prévention et d’hygiène. Avec la banqueroute du système sanitaire, elles n’auraient pas eu non plus d’endroit où se soigner. Haïti n’est pas un pays très touristique et donc, avec officiellement moins de 10 000 personnes infectées et 232 morts, ce pays de 12 millions d’habitants s’en sort relativement bien.

Cependant, si le Covid a été plus ou moins clément jusqu’à présent, on ne peut pas en dire autant des classes riches, des grands commerçants, des patrons qui ont surtout vu dans cette période une opportunité pour s’enrichir davantage.

Et c’est évidemment la classe ouvrière et les masses populaires qui ont payé le plus lourd tribut à cette pandémie.

Dès l’annonce des premiers cas de Covid-19 et la mise en place de l’état d’urgence sanitaire au mois de mars 2020, tous les prix ont explosé. Ceux des produits de première nécessité, du transport en commun, du gazole, alors qu’en application de l’état d’urgence, le gouvernement avait fermé les portes de toutes les entreprises, dont celles de la sous-traitance, qui regroupent plusieurs dizaines de milliers d’ouvriers, ainsi que des établissements scolaires, des églises, et certains marchés publics. De plus, les restrictions au déplacement d’une ville à une autre ont empêché ceux qui le voulaient de fuir la ville pour se ravitailler auprès de leur famille à la campagne. Le ralentissement des activités économiques, sans aucune mesure d’accompagnement, son impact sur la vie de la population dont une grande partie vit au jour le jour dans les rues, a été comme un arrêt de mort.

Du jour au lendemain, des milliers de travailleurs se sont retrouvés au chômage, sans aucun moyen de subsistance. La baisse des transferts d’argent de la diaspora (les émigrés) vers Haïti, une source essentielle de vie, a eu des effets désastreux sur la vie déjà précaire des travailleurs.

Cela a conduit à quelques manifestations de mécontentement pour dénoncer les classes riches, les politiciens, le gouvernement, ceux qui, retranchés dans leurs belles villas, congélateurs et réfrigérateurs bien remplis, pouvaient, sans souci, inviter les masses populaires à se confiner chez elles dans l’enfer des ghettos, le ventre creux. Dans ces manifestations on pouvait entendre : « On préfère mourir du Covid que de faim » !

Il y a eu une mobilisation de petites marchandes qui ont dressé des barricades pour protester contre les maires qui, sous prétexte d’assainissement, brûlaient les marchés et les quelques biens dont elles disposaient.

Si, malgré tout, le gouvernement appelait au respect des gestes barrières et à la distanciation sociale, il a pris la décision, sous la pression des patrons, de rouvrir les usines deux semaines seulement après le début de la pandémie, alors que les premiers cas de la maladie commençaient à se multiplier. Pour l’opinion publique, le gouvernement et l’association des patrons indiquaient avoir pris toutes les mesures d’hygiène nécessaires pour protéger la santé des travailleurs. Mais en réalité rien n’a été fait. Que ce soit dans les transports en commun – les tap-tap, ces camionnettes de huit places dans lesquelles on s’entasse à vingt – ou devant les usines de sous-traitance, devant le parc industriel, les ouvriers se serrent toujours dans la même promiscuité.

Le travail reprenait avec l’assentiment des ouvriers qui avaient déjà perdu leur quinzaine. À l’intérieur des usines, qui sont des hangars sans aération, sans eau, sans savon, aucune mesure de distanciation n’existe, à part le port d’un masque aux qualités douteuses que les patrons exigeaient ; et la cantine des travailleurs est toujours au bord des rues, dans la poussière et dans la boue.

En accompagnement des travailleurs face aux difficultés financières, le gouvernement a pris quelques mesures démagogiques comme la promesse de payer le chômage partiel aux ouvriers de la sous-traitance et de distribuer 1 500 gourdes, soit 18 euros, aux trois millions d’Haïtiens les plus pauvres. Seules quelques centaines de travailleurs ont reçu la moitié de la paye d’une quinzaine de jours de travail, et moins de 5 % des trois millions ont reçu les 18 euros. Une seule fois.

Cela dit, ce n’est plus la pandémie qui fait l’actualité mais la crise politique et l’insécurité due à la prolifération des gangs armés. La population sombre sous les coups d’une alliance entre le pouvoir et des bandes armés. Sûrs de leur impunité, conscients d’être les bras armés du régime, ces gangs armés multiplient les actes criminels contre la population : braquages, vols à main armée, kidnapping contre rançon, exécutions sommaires. C’est à visage découvert qu’ils opèrent dans la capitale et dans les principales villes du pays. Ils terrorisent la population pour éteindre les mobilisations qui avaient commencé il y a deux ans avec l’affaire du détournement de fonds PetroCaribe.

Un rapport du département du Trésor des États-Unis révèle que l’un des plus grands massacres, survenu le 13 novembre 2018 à La Saline, un bidonville de la capitale, fut l’œuvre du représentant départemental du président Jovenel Moïse ; que la planification et l’organisation de la tuerie furent faites par le directeur général du ministre de l’Intérieur, et son exécution menée avec l’aide des bandes armées par Jimmy Chérisier, un ancien de la police nationale haïtienne devenu l’un des principaux chefs de gang de la capitale.

Ces représentants du pouvoir fournissent les armes à feu, des véhicules et des uniformes aux membres des gangs. Chérisier organise aujourd’hui les tueries dans tous les quartiers populaires de Port-au-Prince. Réputé pour brûler ses victimes, il est surnommé Barbecue. Il est à la tête d’une alliance des neuf principaux gangs de la capitale, qui s’est baptisée G9, et reçoit plus d’argent, d’armes et de protection politique que la police nationale. Le G9 parade dans les rues, kidnappe, tue, viole, menace… Personne n’est épargné.

À l’approche des élections présidentielles la course à l’armement s’intensifie. Ces groupes armés représentent l’instrument de pression privilégié pour influencer le vote dans les quartiers populaires et pour réduire au silence les opposants.

Le 19 juillet dernier, au cours d’une rencontre avec des leaders communautaires au Palais national, Jovenel Moïse a lâché tout de go : « Personne ne pourra nous reprendre le pouvoir. Jamais. Ils ne le pourront pas, quelle que soit l’élection organisée dans le pays. » Il projette de changer la Constitution. Depuis janvier 2020, il n’y a plus de Parlement ni d’élections. Jovenel Moïse gouverne par décret.

Pour couronner le tout, il vient de publier un décret portant sur la création de l’Agence nationale d’intelligence (ANI), un service secret présidentiel qui a les pleins pouvoirs pour perquisitionner et arrêter. Dans les faits, il s’agit d’une milice comme celle des Tontons Macoutes sous Duvalier. Encore une arme forgée contre les classes pauvres, contre tous les opposants au pouvoir, et surtout la porte ouverte à un régime dictatorial.

Prenant naissance avec la complicité du pouvoir mais aussi des politiciens de l’opposition, ces groupes mafieux et criminels, recrutés parmi les plus pauvres, les jeunes désœuvrés et affamés, sont un véritable danger pour la classe ouvrière et les masses populaires.

Nous essayons dans nos discussions avec les travailleurs et nos contacts dans les quartiers, de montrer que ce sont leurs initiatives et leurs luttes qui peuvent mettre hors d’état de nuire ces bandes de malfrats. Face à ces bandes qui s’en prennent aux personnes isolées et désarmées, enfants, femmes, vieillards, nous militons pour que se dresse la lutte consciente et organisée de la population. Nous prenons en exemple toutes les initiatives prises, même les plus petites, pour faire face à l’horreur ; comme ces ouvriers qui se regroupent pour aller au travail, les parents qui se regroupent pour emmener les enfants à l’école pour éviter les kidnappings ; toutes les initiatives de résistance où les agressés ont su mettre des bandits hors d’état de nuire. Ce fut le cas à Jérémie, une ville dans le sud du pays où les habitants ont décidé, le 2 décembre dernier, de veiller toute la nuit en manifestant pour faire changer la peur de camp. La participation a été massive et les riverains ont crié victoire. À Carrefour, la population armée de piques et de machettes a résisté pendant trois jours à un groupe de gangsters et les a fait reculer.

Venons-en à la classe ouvrière, toujours la première à payer les différentes crises du système d’exploitation. Au plus fort de la pandémie, alors que le gouvernement appelait les gens à rester chez eux, les travailleurs furent contraints, sous peine de mourir de faim, de se livrer au virus dans les transports en commun, dans les usines. D’autres, malgré leur besoin de travailler, étaient licenciés sous prétexte que, les frontières étant fermées, il n’y avait plus de boulot pour eux.

Depuis la reprise, c’est la baisse de la valeur du dollar par rapport à la monnaie nationale, la gourde, qui est invoquée pour justifier les plans de licenciement et les baisses de salaire.

Il y a environ deux mois, la gourde s’est appréciée d’environ 50 % par rapport au dollar, passant en six semaines de 125 à 62 gourdes pour 1 dollar. Les travailleurs et les classes pauvres en général s’attendaient à une baisse considérable des prix des produits de première nécessité et à une baisse du coût de la vie. Dans le commerce et les services, à part quelques denrées alimentaires, les prix sont restés les mêmes, voire ont augmenté à l’image des produits pétroliers dont les prix en dollars ont presque doublé. Cela entraîna une nouvelle augmentation du prix des transports.

Devant cette montée de la gourde, les patrons des usines de la sous-traitance ont sorti leurs griffes, dénonçant la dévaluation du dollar, monnaie dans laquelle ils reçoivent le montant de leurs commandes alors qu’ils sont habitués à payer les ouvriers en gourdes sans valeur.

Ils sont donc montés au créneau, menaçant de licencier des dizaines de milliers de travailleurs ou de fermer leurs usines si le gouvernement ne prenait pas les mesures nécessaires pour ramener le dollar à son ancien cours. Certains imposent aux travailleurs de choisir entre diminution de leur salaire et licenciement ; d’autres procèdent à des licenciements purs et simples.

Cédant au chantage des patrons, le président a annoncé que l’État est prêt à payer à leur place une partie des salaires des travailleurs du secteur de la sous-traitance. Les ouvriers se demandent comment un État qui ne paye pas ses employés peut trouver des millions de gourdes pour payer les ouvriers, ils n’y croient pas du tout.

Dans certaines usines, des patrons ont dû reculer sur la baisse des salaires devant la colère des travailleurs. En dépit de la morosité de la situation générale, les travailleurs n’ont pas tout à fait baissé les bras. Çà et là, ils sont entrés en lutte pour dénoncer leur exploitation et défendre leurs droits, tant dans l’administration publique que dans le secteur privé, notamment celui de la sous-traitance. Ils ont organisé de nombreux arrêts de travail, des grèves pour de meilleures conditions de travail et aujourd’hui pour refuser la baisse de leur salaire, la baisse du temps de pause et le paiement des heures supplémentaires.

Une de ces grèves mérite quelques mots. Elle s’est déroulée sur une période de trois mois depuis juillet, c’est une première, dans une usine de sous-traitance où nous diffusons un bulletin depuis une vingtaine d’années. Les travailleurs en grève protestaient contre le fait que leur patron prélève sur leur salaire une prime d’assurance santé mais garde cet argent sans le transmettre à la centrale. Si bien que lorsque les travailleurs se présentent à l’hôpital, ils sont chassés. Quand ils contestent on leur répond que le patron n’a pas payé l’assurance. La mort d’un ouvrier suite à un refus de dialyse, puis la mort d’une ouvrière avec son bébé dans le ventre faute de soins furent la goutte d’eau qui fit déborder le vase. L’enterrement de l’ouvrière se transforma en manifestation et la grève se déclara dans une usine appartenant à ce patron.

Pendant trois mois, les travailleurs qui réclamaient le remboursement des sommes indûment prélevées ont appris, avec leur comité de grève, à organiser un piquet de grève, à occuper une usine, à faire des collectes, à discuter avec la police, à parler à la radio, et à se soutenir les uns les autres pour résister aux manœuvres dilatoires du patron et de ses sous-fifres. Ils ont appris à se réunir régulièrement pour poser les problèmes que soulève la tenue de la grève. Ce fut une formidable expérience, même si dans l’ensemble, les travailleurs n’ont pas eu le résultat escompté face au patron (promesse de 10 % de remboursement et promesse de versement des cotisations à la centrale). Malgré la révocation de presque tout le comité de grève, tous sont sortis regonflés après la grève.

Une autre grève a opposé les travailleurs de trois entreprises appartenant à ce même patron. Près de 800 ouvriers ont été licenciés sans préavis et sans indemnités de licenciement. Ils se sont bagarrés de septembre à décembre jusqu’à l’obtention du préavis et de leurs indemnités devant un bureau de conciliation et d’arbitrage relevant de l’État. Ces bagarres ont bien entendu remonté le moral des camarades. Nous popularisons autant que faire se peut ces petites victoires et nous nous appuyons dessus pour indiquer la voie et demander aux travailleurs des autres entreprises d’emboîter le pas pour ne pas se laisser piétiner.

Union africaine des travailleurs communistes internationalistes (Côte d’Ivoire)

La situation politique actuelle en Côte d’Ivoire découle de l’élection présidentielle qui a eu lieu à la fin du mois d’octobre. Malgré les dix ans passés au pouvoir et son âge avancé, Ouattara a brigué un troisième mandat dont la légalité est contestée par son opposition.

Ce pays compte trois principaux partis politiques historiques qui ont pour base trois groupes ethniques. Autour d’eux s’adjoignent de petits partis ayant leur propre base ethnique. Les trois principaux partis sont de force à peu près égale. Les transfuges ne manquent pas, des alliances se nouent et se dénouent au gré des intérêts et du rapport de force du moment.

Comme à leur habitude, les politiciens au pouvoir et ceux de l’opposition ont joué sur l’ethnisme et la xénophobie pour mobiliser leurs troupes. L’histoire se répète tous les cinq ans depuis la mort de Houphouët-Boigny en 1993.

Ouattara n’a peut-être rien à craindre du côté de son opposition et des forces armées, mais son pouvoir pourrait être déstabilisé par des conflits fonciers sur un fond d’ethnisme et de xénophobie, notamment à l’ouest, le long de la frontière libérienne. Dans cette région, la tension est grande. Les spoliations et les violences perpétrées depuis une vingtaine d’années par des bandes armées ont contribué à envenimer la situation. C’est une poudrière que les dirigeants de l’opposition pourraient embraser.

Vue de l’occident, la Côte d’Ivoire passe pour un des rares pays de cette région d’Afrique dont l’économie est relativement florissante, un pays en pleine construction, etc. Ça, c’est la vue côté jardin, du point de vue de la bourgeoisie. Effectivement, même la ville d’Abidjan a complètement changé ces dix dernières années, avec ses grandes artères, ses restaurants luxueux, ses centres commerciaux, ses immeubles aux façades dorées, etc. Les riches vivent dans une opulence affichée et visible de tous.

Mais côté cour, du point de vue des populations pauvres, c’est une tout autre réalité. Leurs conditions d’existence ne cessent de se dégrader d’année en année. Même au cœur de la capitale économique, la pauvreté et la misère continuent de s’aggraver. Au chômage de masse s’ajoutent toutes sortes d’injustices que les populations pauvres subissent : opérations de « déguerpissement » de quartiers entiers, destructions d’étalages de petits vendeurs, etc. Du côté des travailleurs, il y a les bas salaires et la précarité alors que le coût de la vie ne cesse d’augmenter et grignote le peu qu’ils gagnent. Un signe ne trompe pas, c’est l’abondance de petits vendeurs de rues, d’enfants de travailleurs qui courent entre les voitures pour nettoyer leurs vitres le soir après l’école et le week-end, de petits écoliers cireurs de chaussures, etc.

Dans les quartiers, devant chaque maison il y a des étals. Tout le monde vend quelque chose. Il y a encore trente ans, il n’y avait rien de tout cela à Abidjan.

Dans les entreprises, les conditions de travail sont souvent infernales. Les patrons imposent une cadence extrême et certains travailleurs ne tiennent pas plus de quelques mois. Le salaire couvre de moins en moins les besoins des familles ouvrières. Après les heures de travail à l’usine, il faut se débrouiller pour compléter son revenu : vendre de petites choses, oranges ou beignets, laver et repasser le linge des gens du quartier, etc. On se débrouille comme on peut pour ne pas crever de faim même quand on a déjà un travail.

Les pauvres vivent dans leurs quartiers, toutes ethnies et nationalités confondues, sans problèmes de cohabitation.

Mais dans ce contexte d’aggravation générale de la misère, les dirigeants politiques soufflent sur le feu de l’ethnisme et de la xénophobie. Et il n’en faut pas beaucoup pour que le feu se ravive. C’est ainsi que s’étaient produits dans un passé récent des massacres à Abobo et à Yopougon, deux communes populaires du district d’Abidjan, par des miliciens armés.

La crainte d’un nouvel embrasement à caractère ethnique et xénophobe était bien réelle et les habitants des quartiers pauvres l’ont ressentie comme telle.

Des habitants ont commencé à déménager de leur quartier pour rentrer au village car ils ne se sentaient plus en sécurité à cause de leur ethnie considérée comme hostile à Ouattara et favorable à Gbagbo.

Nous étions les seuls à défendre un point de vue de classe et nous nous sommes exprimés en sortant un papier s’adressant aux travailleurs de toutes les ethnies et de toutes les nationalités.

Ce sont les politiciens accrochés au pouvoir ou ceux qui veulent y parvenir qui jouent sur la fibre ethnique. Mais il faut aussi comprendre que l’ethnisme n’est qu’un aspect d’un problème plus vaste. Il y a le sous-développement, le problème foncier, la misère, les cicatrices des massacres passés, etc.

C’est dans ce contexte que s’est déroulée l’élection présidentielle. L’opposition ayant appelé au boycott, l’élection n’a pas pu se tenir normalement dans de nombreuses régions. Les résultats communiqués par la commission électorale indépendante ont été complètement truqués, et le taux de participation gonflé.

Officiellement, il y a eu moins d’une centaine de morts, contre des milliers de morts et des dizaines de milliers de réfugiés lors des crises précédentes de 2000, 2004 et 2010.

Aussitôt après la proclamation des résultats, les principaux partis d’opposition regroupés au sein d’une plateforme ont mis en place le Conseil national de transition (CNT), une sorte de gouvernement bis en opposition au gouvernement officiel. Le CNT a aussitôt appelé à la désobéissance civile, mais cette annonce a eu pour seul effet des massacres interethniques dans plusieurs villes de l’intérieur. À Abidjan, ce furent surtout des véhicules calcinés, dont plusieurs bus.

Depuis lors, sous la pression de l’impérialisme, Ouattara et Bédié, les deux principaux leaders, se sont rencontrés en l’absence de l’ancien président Gbagbo, toujours en exil à Bruxelles.

Le CNT a fait long feu. Pour autant, rien n’est réglé ; les négociations sont ouvertes. L’opposition demande une nouvelle Constitution, un gouvernement provisoire, de nouvelles élections, etc. En somme, le départ de Ouattara, qui ne l’entend pas de cette oreille.

L’opposition a, en fait, montré toute son impuissance face au pouvoir en place.

Rappelons que le pays était resté coupé en deux, entre Nord et Sud, durant une dizaine d’années, suite à une rébellion armée. Ouattara lui-même fut porté ensuite au pouvoir avec le soutien de cette même rébellion et des forces armées françaises.

En dix ans de pouvoir, Ouattara a eu le temps de fortifier son régime. Il a renforcé son emprise sur les forces de l’ordre par l’intégration de nouvelles recrues, notamment des nordistes, dans l’armée, la police, la gendarmerie, la douane. Il a créé un climat délétère au sein de tous ces appareils puis favorisé ce qu’il a qualifié de « départs volontaires » en payant à ces « volontaires » environ vingt mille euros chacun. Il a aussi démantelé les forces rebelles qui s’étaient installées au Nord durant une dizaine d’années. Pour cela, il a d’abord intégré l’état-major de la rébellion au sein de l’armée officielle. Quelques-uns ont été propulsés au rang de capitaine et même de colonel. Les rares officiers ont été bombardés généraux, puis poussés à la retraite.

Un de ces anciens soldats de la rébellion, peut-être simple caporal à l’origine, est aujourd’hui préfet de région et avant tout grand homme d’affaires. Ils sont quelques-uns de son acabit à brasser aujourd’hui des milliards grâce à leur accès aux bureaux très haut placés des ministères. Ils obtiennent des contrats juteux dans les projets d’électrification rurale, d’accès à l’eau des villages, etc.

Durant ses dix ans de pouvoir, Ouattara a aussi démantelé des milliers d’ex-miliciens armés de Soro Guillaume, en usant de la force quand cela était nécessaire. Il avait d’autant moins de mal à le faire que tous deux sont originaires du Nord.

Le noyautage des forces armées par des gens favorables à Ouattara, sélectionnés le plus souvent sur des bases ethniques, a permis de réduire les forces de Bédié, de Gbagbo et de Soro Guillaume à néant au sein de ces forces. Le parti de Bédié a aussi été délesté de plusieurs de ses caciques, intégrés au pouvoir actuel. Quant au FPI, le parti de Gbagbo, il s’est scindé en deux morceaux.

À part aboyer et s’emparer d’arguments ethnistes et xénophobes, l’opposition n’a pas d’armes pour l’instant.

Ouattara est donc au pouvoir, plus fort que jamais, tant que les populations pauvres ne se révoltent pas. Mais cette cocotte-minute sociale pourrait aussi exploser et donner du fil à retordre aux tenants du pouvoir et aux capitalistes qui continuent de faire des fortunes au milieu de cet océan de misère.