Grande-Bretagne - Le Scottish Socialist Party d'une égratignure électoraliste à la gangrène réformiste

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Novembre 2000

Pour l'ensemble du mouvement révolutionnaire, le problème de la construction du parti révolutionnaire nécessaire à la classe ouvrière pour renverser le système capitaliste reste à résoudre. A ce jour, aucune des nombreuses tendances révolutionnaires qui existent de par le monde pas plus la nôtre que les autres, d'ailleurs ne peut affirmer avoir franchi une étape décisive dans cette direction. Dans la plupart des cas, les groupes révolutionnaires demeurent isolés de la classe ouvrière et, en tout cas, sans influence sur ses luttes.

En Grande-Bretagne, au cours des vingt dernières années, un certain nombre de groupes révolutionnaires ont tenté de mettre en oeuvre des politiques visant en tout cas c'est ainsi que ces groupes les ont présentées à donner une réponse à ce problème. Ces tentatives ont généralement consisté en un "détour" effectué par ces camarades au travers d'organisations plus "larges" c'est-à-dire en fait réformistes dans lesquelles les possibilités de défendre une politique révolutionnaire, sans parler de la mettre en pratique, étaient au mieux limitées.

Disons tout de suite que la plupart de ces tentatives se sont soldées plus par des pertes que par des gains pour les groupes concernés. Et même lorsqu'ils y ont gagné quelque chose, au moins en apparence, rien ne permet de dire que le même résultat, ou mieux encore, n'aurait pu être atteint en militant dans le cadre d'une organisation indépendante sur la base du programme révolutionnaire, au lieu de se soumettre à l'auto-censure politique résultant de leur immersion dans une organisation réformiste.

Parmi ces tentatives, la plus récente et celle considérée par l'ensemble de l'extrême gauche britannique comme la plus "réussie" est la constitution, en 1998, du Scottish Socialist Party (SSP ou Parti Socialiste Ecossais) qui, rappelons-le, est l'aboutissement d'une politique menée depuis des années par Scottish Militant Labour, un groupe se réclamant du trotskysme dont les militants constituent aujourd'hui encore le noyau du SSP.

Le bilan de l'entrisme

Tout "écossais" qu'est le SSP ou plus exactement, nationaliste écossais le processus qui a conduit à sa formation est étroitement lié à l'évolution de l'extrême gauche britannique dans son ensemble au cours des années quatre-vingts, et plus particulièrement de celle de l'une de ses tendances, plus connue sous le nom de son hebdomadaire, Militant.

Il faut rappeler que pendant toute cette décennie, une grande partie de l'extrême gauche britannique pratiqua l'entrisme au sein du Parti Travailliste. La plupart de ces groupes présentaient cet entrisme comme une tactique temporaire, un de ces "détours" mentionnés plus haut. Mais pour Militant, il s'agissait de tout autre chose puisque ces camarades, dont la tendance existait depuis les années cinquante, n'avaient en fait jamais eu d'existence indépendante hors du Parti Travailliste. Militant prétendait que, sous sa direction, le Parti Travailliste pourrait "remplir sa tâche historique, la transformation socialiste de la société britannique". Cela revenait non seulement à prétendre que la vieille machine réformiste du Parti Travailliste, pourrie jusqu'à la moelle par trois quarts de siècle d'intégration dans l'appareil d'Etat de la bourgeoisie, pouvait se muer en parti révolutionnaire, mais, en plus, à donner à ce parti réformiste le rôle historique que Marx avait attribué à la classe ouvrière.

Néanmoins, au début des années quatre-vingt-dix, l'extrême gauche entriste au sein du Parti Travailliste se trouva prise au piège. D'un côté, il lui fallait prendre ses distances par rapport au glissement de plus en plus droitier du cours de ce parti. De l'autre, elle devait faire face à une chasse aux sorcières de plus en plus efficace contre toute forme d'opposition organisée au sein des rangs travaillistes. Les entristes se trouvèrent marginalisés. Ils perdirent les positions qu'ils avaient acquises sans réussir à obtenir un soutien significatif de la part des membres du parti. Du coup la plupart abandonnèrent l'entrisme, ou tout au moins déplacèrent le centre de gravité de leurs activités à l'extérieur du parti.

C'est à cette époque, en 1992, que la majorité de Militant décida de sortir du Parti Travailliste pour la première fois de son histoire, d'abord en Ecosse où ses militants constituèrent Scottish Militant Labour, puis dans le reste de la Grande-Bretagne sous le nom de Militant Labour.

Contrairement au reste des entristes, Militant sortit du Parti Travailliste avec des forces significatives, malgré la perte d'un nombre important de ses supporters qui refusèrent de le suivre dans une existence indépendante à laquelle ils n'étaient guère préparés. Mais il faut noter que le recrutement de Militant ne venait pas tant de son activité au sein du Parti Travailliste. C'est ce que soulignèrent les partisans de la création d'une organisation indépendante au cours de la discussion interne de 1991 à ce sujet, en attribuant ce recrutement au rôle joué par Militant dans la lutte contre le "poll tax". En effet, c'est à Militant que revint le crédit d'avoir pris l'initiative de lancer une campagne contre cet impôt local inique (qui devait peser sur tous les adultes de la même façon, indépendamment de leurs revenus) avant même qu'il soit introduit par Margaret Thatcher à la fin des années quatre-vingts. Et lorsque le mécontentement suscité par le "poll tax" finit par exploser, d'abord en Ecosse puis dans le reste du pays, c'est tout naturellement qu'une partie des mécontents se tourna vers les comités mis en place par Militant et ceux qui les animaient, et cela en dépit du fait que ces militants appartenaient au Parti Travailliste un parti dont la direction s'était opposée ouvertement à toute résistance au "poll tax" et qui, dans les municipalités qu'il contrôlait, imposait le "poll tax" à la population avec autant de zèle que les conservateurs.

Si Militant est malgré tout resté dans les rangs travaillistes jusqu'en 1992, ce fut pour conserver les positions électives qu'il avait acquises sous la bannière travailliste : à la différence des autres groupes entristes et malgré les mesures d'exclusion et de suspension qui l'avaient frappé depuis le milieu des années quatre-vingts, le groupe avait encore deux députés travaillistes (Dave Nellist à Coventry et Terry Fields à Liverpool) ainsi qu'un certain nombre de sièges dans les conseils municipaux, en particulier à Liverpool et à Glasgow. Mais, à cet égard, l'année 1991 marqua un tournant. L'appareil travailliste interdit à Nellist et à Fields de se représenter au nom du Parti Travailliste aux élections parlementaires prévues pour l'année suivante et tous les conseillers liés à Militant qui siégeaient au conseil municipal de Liverpool furent exclus. C'est ce dernier développement qui conduisit Militant à présenter des candidats indépendants aux élections municipales de 1991 à Liverpool contre les candidats travaillistes officiels, se présentant ainsi dans les faits comme une organisation indépendante avant même d'avoir formellement quitté le Parti Travailliste.

Il semble néanmoins que Militant ait eu quelques illusions quant au poids électoral qu'il pouvait avoir face au Parti Travailliste. C'est ainsi que le score réalisé par sa candidate Lesley Mahmood lors de l'élection législative partielle de Liverpool-Walton durant l'été 1991 6,6 % contre 54 % au candidat travailliste dans une circonscription considérée par Militant comme l'un de ses bastions suscita bien des désillusions et des polémiques dans l'organisation. Il devint évident qu'en dépit du crédit gagné au travers de la lutte contre le "poll tax", Militant serait vite marginalisé sur le plan électoral. Et, depuis cette époque, les organisations qui prirent la suite de Militant n'ont cessé de rechercher alliés et respectabilité électorale dans l'espoir de regagner une partie des positions gagnées jadis sous la bannière travailliste.

Le "tournant écossais" vers... le réformisme

La chasse aux sorcières menée par le Parti Travailliste à Liverpool incita finalement Militant à sortir du Parti Travailliste. Mais ce fut son organisation écossaise qui fut l'aile marchante de ce tournant d'où le nom qu'on lui donna de "tournant écossais" en soumettant, en avril 1991, un document interne prônant la constitution d'une organisation indépendante. Les arguments des partisans écossais de ce tournant valent d'être examinés de plus près car ils fournissent l'amorce du fil conducteur qui mène au SSP d'aujourd'hui.

Dans un document de discussion intitulé "Ecosse : perspectives et tâche", ces militants analysaient la situation dans le Parti Travailliste dans les termes suivants : "En Ecosse comme dans pratiquement toute la Grande-Bretagne, la gauche travailliste est réduite aujourd'hui à une poignée d'individus isolés (...). La déroute du réformisme de gauche et du stalinisme a ouvert, pour l'instant en tout cas, un vide béant permettant aux forces du marxisme (c'est-à-dire, dans le langage codé de ces camarades, à Militant LDC) de jouer un rôle dirigeant dans les événements".

Mais le document se gardait bien de préciser comment une tendance révolutionnaire pouvait occuper le vide laissé par deux courants réformistes en l'absence d'un certain degré de radicalisation dans la classe ouvrière. Or, comme il n'y avait pas le moindre indice d'une telle radicalisation, ce que proposaient les partisans du "tournant écossais", ce n'était pas seulement d'occuper le vide laissé par le réformisme de gauche et le stalinisme, mais bien d'endosser les défroques réformistes de ces deux courants.

En fait, ce document allait plus loin encore dans ce sens. Ainsi, prenant pour exemple l'influence gagnée en Ecosse par le Parti Communiste grâce au rôle qu'il avait joué lors des grèves de mineurs de 1972 et 1974, il affirmait que sur la base du crédit gagné par Militant dans la lutte contre le "poll tax", "aujourd'hui nous sommes en position pour effectuer un grand bond en avant (...). Pour tirer un parti maximum de la nouvelle situation, il est impératif d'effectuer un tournant vers une organisation ouverte".

Il y avait pourtant bien des objections à ce parallèle. Par exemple, l'écart considérable entre le niveau de combativité ouvrière des années soixante-dix et la démoralisation engendrée par le poids du chômage au début des années quatre-vingt-dix. Qui plus est, en 1991, la base ouvrière de Militant en Ecosse était sans commune mesure avec celle, bien plus large, du Parti Communiste en 1974. Mais surtout, ce document se gardait bien de préciser le fait que l'influence du Parti Communiste avait été non seulement assise sur une politique réformiste mais qu'en plus elle avait été de plus en plus dépendante de son intégration dans les appareils syndicaux, grâce au soutien sans faille que le Parti Communiste avait appporté aux mesures d'austérité des gouvernements travaillistes de l'époque.

Pour une organisation révolutionnaire, c'était choisir un bien curieux modèle ! Mais ce qui plaisait sans doute tant aux rédacteurs de ce document dans l'expérience du Parti Communiste, c'était son succès à occuper des positions au sommet des appareils syndicaux. Ils "oubliaient" seulement que de tels succès ont un prix encore faut-il se rendre acceptable aux yeux de la bureaucratie syndicale.

Une adaptation honteuse au nationalisme

Le document des partisans du "tournant écossais" poursuivait en invoquant la situation particulière créée en Ecosse par ce qu'ils appelaient la "question nationale".

Il faut rappeler à ce sujet que l'Ecosse, qui compte aujourd'hui cinq millions d'habitants environ, a perdu son indépendance à la fin du 17e siècle. Mais il fallut attendre la crise économique des années trente pour qu'apparaisse un courant nationaliste organisé, le Parti National Ecossais (SNP). Celui-ci n'est sorti de la marginalité que dans les années soixante, sur la base d'une démagogie populiste mais en jouant à fond la carte d'un parlementarisme très respectueux des institutions britanniques et surtout en profitant du discrédit des principaux partis. C'est d'ailleurs pour anticiper ce discrédit et éviter par avance un transfert électoral au profit du Parti National Ecossais dont il aurait fait les frais que, dès avant les élections de 1992, le Parti Travailliste avait promis la mise en place d'un parlement écossais. Quant à la "question nationale" écossaise, elle ne peut que laisser sceptique s'agissant d'une région dont la population s'est intégrée à la population britannique au cours du grand brassage de la révolution industrielle, au point d'en oublier sa langue dès le début du 19e siècle.

Quoi qu'il en soit, le document des partisans du "tournant écossais" poursuivait en disant qu'une fois les travaillistes au pouvoir et compte tenu de la démagogie de gauche à laquelle se livre traditionnellement le Parti National Ecossais contre les gouvernements travaillistes, "c'est le Parti National Ecossais qui sera le principal bénéficiaire de l'inévitable désillusion créée par le gouvernement travailliste (...). C'est le nationalisme qui constituera le plus grand danger pour le mouvement ouvrier (...) . La formation d'une organisation marxiste indépendante pourrait constituer un puissant pôle d'attraction pour ceux des sympathisants, ou même des membres, du Parti National Ecossais qui ne sont pas des nationalistes invétérés, mais qui voient dans ce parti la seule véritable alternative organisée au travaillisme. Ce serait particulièrement vrai de la jeunesse (...). C'est le développement d'un puissant mouvement marxiste en Ecosse, doté d'un programme révolutionnaire militant et d'une politique bien pensée sur la question nationale, qui peut faire contrepoids à l'attraction qu'exerce le nationalisme".

Bien sûr, on ne pouvait que souscrire à la nécessité d'une organisation révolutionnaire capable de faire contrepoids au nationalisme. Mais quelle était donc la "politique bien pensée sur la question nationale" que devrait avoir la future organisation ? Dans la logique des objectifs définis ci-dessus, une telle politique ne pouvait que dénoncer le nationalisme écossais comme un instrument réactionnaire au service des ambitions d'une petite bourgeoisie écossaise cherchant à se ménager une place au sommet de l'Etat et comme une diversion contre l'unité de la classe ouvrière et ses intérêts de classe. Néanmoins, le document des partisans du "tournant écossais" ne précisait pas ce qu'ils entendaient par cette formule. Mais de fait, des contradictions apparaissaient déjà clairement dans leur démarche : le seul fait de proposer une organisation séparée en Ecosse n'était-il pas, en lui-même, une concession de taille au nationalisme ?

Finalement le contenu de cette "politique bien pensée sur la question nationale" fut précisé dans un autre texte de discussion publié quelques mois plus tard, cette fois-ci par la majorité de la direction nationale de Militant : "Notre position est claire.", disait ce texte, "Nous soutenons la revendication d'un parlement écossais doté des pleins pouvoirs sur le plan économique et nous soutenons le droit à l'autodétermination, et éventuellement à la séparation, si une grande majorité y est favorable. Néanmoins nous ne revendiquons pas la séparation. (...) Nous sommes implacablement opposés au nationalisme et à la division du mouvement ouvrier en fonction des courants nationalistes" mais, curieusement, les auteurs de ce texte n'étaient pas opposés à la division de leur propre organisation sur les mêmes bases !

En fait, cette prétendue "politique bien pensée sur la question nationale" était l'exemple type d'une politique consistant à prôner une idée tout en faisant le contraire. Comment une organisation pouvait-elle être "implacablement opposée au nationalisme" et "faire contrepoids à l'attraction qu'exerce le nationalisme" tout en reprenant la revendication d'un parlement écossais c'est-à-dire d'une institution qui, sous prétexte de défendre les "intérêts nationaux" écossais, ne serait qu'un instrument de plus aux mains de la bourgeoisie (écossaise ou anglaise, c'est la même) pour imposer l'exploitation capitaliste à la classe ouvrière écossaise ?

Mais sans doute ce que les auteurs de ces documents entendaient par une "politique bien pensée sur la question nationale", c'était avant tout une politique qui n'allait pas à l'encontre des préjugés nationalistes des sympathisants et membres du Parti National Ecossais que le "tournant écossais" visait à attirer. Ayant ainsi vidé leurs grandes déclarations internationalistes de tout contenu concret, les partisans du "tournant écossais" se lançaient dans la construction d'une organisation se réclamant de l'extrême gauche, peut-être, mais se plaçant avant tout sur le terrain du nationalisme écossais.

De Socialist Militant Labour au Parti Socialiste Ecossais

Du point de vue des objectifs définis précédemment, Scottish Militant Labour, l'organisation écossaise issue du "tournant écossais", connut initialement un relatif succès. Tout juste trois mois après son lancement, lors des élections législatives de 1992, son porte-parole à Glasgow, Tommy Sheridan, remporta 19 % des voix dans la circonscription ouvrière de Glasgow-Pollock, alors qu'il purgeait une peine de six mois de prison pour avoir dirigé une manifestation contre la vente aux enchères des biens d'un habitant de la ville coupable d'avoir refusé de payer le "poll tax". Et le mois suivant, lors des élections municipales, Sheridan et trois de ses camarades furent élus au conseil municipal de Glasgow.

Ces succès reflétaient le crédit gagné par les militants de Scottish Militant Labour dans la lutte contre le "poll tax" et en particulier contre les ventes aux enchères forcées, une forme particulièrement odieuse de recouvrement des dettes spécifique à la législation écossaise. Mais avec le remplacement du "poll tax" par sa forme atténuée qu'était le "council tax", sous le gouvernement conservateur de John Major, cette lutte allait inévitablement se transformer en un combat d'arrière-garde. Par ailleurs les élections de 1992 avaient reconduit les conservateurs au pouvoir, contrairement au pronostic formulé en 1991, ce qui ne faisait qu'alourdir l'ambiance dans la classe ouvrière. Les espoirs qu'avait nourris Scottish Militant Labour de connaître une croissance rapide durent être remis à plus tard. En fait l'organisation resta un petit groupe essentiellement limité à Glasgow, dépourvu des moyens d'acquérir un réel poids électoral, contrairement à ce qu'il avait espéré.

A la fin de 1995, les espoirs de Scottish Militant Labour (et de son organisation soeur en Angleterre, Militant Labour) furent ravivés par le projet d'Arthur Scargill, le leader du syndicat des mineurs, de lancer un nouveau parti à la gauche du Parti Travailliste projet qui donna naissance au Socialist Labour Party (Parti Travailliste Socialiste) d'aujourd'hui. Comme l'essentiel de l'extrême gauche, Scottish Militant Labour se prit à rêver de l'émergence d'un parti d'une taille importante qui lui offrirait les mêmes avantages que le Parti Travailliste lui avait offerts dans les années quatre-vingts celui de lui fournir une bannière électorale, en particulier. Des avances furent faites à Scargill sur ces bases-là. Cependant, il devint vite évident que le nouveau parti ne fournirait pas à Scottish Militant Labour un cadre qu'il pouvait accepter. Tout d'abord parce que Scargill n'avait aucune intention de faire des concessions au nationalisme écossais en consentant la moindre autonomie à la branche écossaise du futur parti, ce qui était totalement inacceptable pour le milieu dont Scottish Militant Labour s'efforçait de gagner les bonnes grâces. Ensuite parce que Scargill fit savoir sans ambages qu'il entendait définir les règles du jeu lui-même, garder un contrôle étroit sur son parti et n'y tolérer aucune fraction organisée.

Dès lors, Scottish Militant Labour se lança en toute hâte dans la constitution d'une alliance électorale en vue des élections municipales de 1996 et des élections législatives qui devaient suivre. Et c'est ainsi que vit le jour la Scottish Socialist Alliance (Alliance Socialiste Ecossaise), en avril 1996, juste à temps pour les élections municipales de mai.

Dans les pages d'une revue d'extrême gauche anglaise, Alan Green, le président de la nouvelle formation, la présenta comme "le résultat de plusieurs années de patientes discussions, d'activités communes et d'unité croissante entre un nombre significatif de militants travaillistes et nationalistes de gauche, de membres de Scottish Militant Labour, d'écologistes, de syndicalistes, de membres des comités contre la construction d'autoroutes et de militants pour les droits des animaux". Evidemment, il oubliait de mentionner que le noyau de cette alliance, et le gros de ses troupes, étaient quand même fournis par Scottish Militant Labour. Mais sans doute la reconnaissance de ce fait n'aurait-elle pas plu aux défenseurs des "droits des animaux" auxquels il voulait montrer patte blanche.

Sur le papier tout au moins, la Scottish Socialist Alliance était censée être plus qu'une simple alliance électorale. Toujours selon Green, l'alliance devait "participer aux combats syndicaux, aux actions directes et aux luttes électorales" (sic). Mais dans le même article Green révélait le véritable objectif de l'alliance en écrivant : "Qu'est-ce qui a bien pu rassembler un éventail aussi large de l'extrême gauche écossaise ? C'est la perspective de la chute des conservateurs au pouvoir et de la création d'un parlement écossais élu à la proportionnelle qui a mis l'accent sur l'unité de l'extrême gauche. La presse écossaise elle-même a reconnu que l'extrême gauche avait une place à occuper en Ecosse grâce à la proportionnelle".

La Scottish Socialist Alliance n'avait donc pour but que de permettre à l'extrême gauche de tirer le meilleur parti du mode de scrutin proportionnel promis par les travaillistes pour le futur parlement écossais. Cette alliance visait à élargir au maximum le champ d'influence de l'extrême gauche, y compris à des courants hostiles à la classe ouvrière. Et parce qu'elle cherchait à plaire à tous ces courants, son programme ne pouvait être qu'un catalogue de revendications destinées à répondre aux préoccupations de chacun d'entre eux, sans jamais préciser comment les imposer, ni surtout faire référence à la lutte des classes que nombre de ces courants méprisaient.

De socialiste, la Scottish Socialist Alliance n'avait que le nom, mais pas le contenu, même si un groupe se réclamant du trotskysme en était la principale composante. Ce n'était qu'un front électoral réformiste et profondément imprégné de nationalisme. On était en tout cas très loin de l'idée d'un "puissant mouvement marxiste en Ecosse, doté d'un programme révolutionnaire militant" qu'avaient défendue en 1991 les militants à l'origine de Scottish Militant Labour.

Et c'est sur ces bases-là, dans la continuité politique de la Scottish Socialist Alliance, que se tint en février 1999 la conférence de fondation du Scottish Socialist Party (SSP) cette fois encore juste à temps pour les premières élections au nouveau parlement écossais, en mai de la même année.

Un micro Parti Travailliste

Sur le plan organisationnel, la transformation de la Scottish Socialist Alliance en parti ne s'est pas traduite par un changement fondamental. Le SSP reste une collection de courants disparates, dominée par les militants qui, jusqu'en 1999, constituaient Scottish Militant Labour, auxquels se sont jointes quelques personnalités venues du Parti Travailliste et du Parti National Ecossais. Il a adopté une structure qui s'inspire des formes organisationnelles éprouvées du Parti Travailliste, dans lesquelles coexistent adhérents individuels et organisations affiliées. Ainsi le SSP peut-il rester une alliance assez lâche entre organisations qui veulent conserver un certain degré d'autonomie, tout en recrutant directement des adhérents individuels.

Le SSP va en fait bien plus loin dans son imitation du Parti Travailliste. Ainsi, dans l'unique paragraphe de ses statuts qui a trait au fonctionnement de ses organismes de base, il est dit que "les sections doivent se donner pour objectif de se réunir tous les quinze jours, mais elles doivent se réunir au moins une fois par mois et viser à organiser des activités (telles que réunions, tables de vente, distributions de tracts, etc.) au moins tous les quinze jours". Mais si les statuts indiquent que chaque adhérent doit être "encouragé" à participer aux réunions des sections, ils n'en font pas une condition d'appartenance à l'organisation. Tout cela signifie que, tout comme au Parti Travailliste, le rôle des sections est de maintenir juste assez de contact entre l'organisation et ses membres pour permettre à la direction du parti de les mobiliser dans les grandes occasions en particulier électorales mais sûrement pas de constituer un instrument d'intervention au jour le jour dans la vie et les luttes de la classe ouvrière.

Une telle orientation vers la classe ouvrière et ses luttes nécessiterait en effet des réunions fréquentes (les événements attendent rarement après les réunions de sections) et une participation systématique de tous les militants à la vie de l'organisation et à ses activités, surtout pour une organisation relativement peu nombreuse. Elle nécessiterait également des pratiques organisationnelles permettant aux militants d'entreprise de bénéficier de la compétence collective et de l'aide matérielle des militants du parti dans leur intervention quotidienne, et d'avoir la possibilité de coordonner leur intervention au sein de chaque entreprise ce que les sections géographiques du SSP, basées sur le lieu d'habitation, rendent pratiquement impossible. Faute de telles pratiques organisationnelles, le SSP ne peut être, au mieux, qu'une machine électorale plus ou moins efficace, à l'instar du Parti Travailliste.

D'ailleurs, la direction du SSP ne tient pas à ce que ses sections se mettent à mener une intervention systématique dans les entreprises, ni même à ce qu'elles se mêlent de discuter l'activité des militants d'entreprise et comment ils pourraient intervenir en tant que militants du SSP. Et il n'est pas difficile d'en voir la raison. Car, en menant une telle intervention, le SSP se mettrait inévitablement à dos nombre de responsables syndicaux qui y verraient une intrusion dans ce qu'ils considèrent comme leur domaine réservé. Or, c'est sur ces responsables syndicaux que le SSP compte pour obtenir l'affiliation de sections syndicales voire de syndicats entiers même si de telles affiliations ne signifient rien quant aux convictions politiques des travailleurs syndiqués. Et si le prix à payer pour ne pas prendre les bureaucrates syndicaux à rebrousse-poil est de ne pas marcher sur leurs plates-bandes, le SSP semble tout prêt à leur abandonner le terrain.

Bien sûr, le SSP parle bien de la lutte des classes, mais c'est pour aussitôt se placer sur le terrain électoral. Ainsi, dans l'un de ses documents, il se décrit comme un "parti né des luttes" qui entend poursuivre le combat "pour la justice et l'égalité pour les travailleurs. Nous pensons qu'il faut imposer le retour du socialisme sur le devant de la scène politique. Les élections ne peuvent être qu'un complément à la lutte de classe et non un substitut". Cette importance accordée à la lutte des classes peut paraître prometteuse... tant qu'on n'a pas lu la phrase suivante qui dit : "nous entendons offrir aux électeurs écossais la possibilité de voter pour une politique clairement socialiste et l'occasion d'influer sur l'avenir de la classe ouvrière ici et à l'échelle internationale". Passons sur la grandiloquence du propos. Mais comment peut-on donner le premier rôle à la lutte de classe tout en essayant de faire croire à l'électorat ouvrier qu'il peut influer sur son avenir (sans parler de celui de la classe ouvrière internationale !) par le bulletin de vote ? Il serait difficile d'imaginer pire étalage d'illusions électoralistes.

Socialisme ou Parlementarisme ?

Que veut dire le SSP lorsqu'il parle d'"imposer le retour du socialisme sur le devant de la scène politique" ? On peut s'en faire une idée à la lecture de la plate-forme électorale, intitulée Une vision socialiste pour une nouvelle Ecosse, sur laquelle il s'est présenté lors de l'élection du parlement écossais en mai 1999.

Pour autant que les mots aient un sens, pour des révolutionnaires, celui de socialisme évoque le renversement du système capitaliste par la révolution prolétarienne et son remplacement par une nouvelle société débarrassée de toute exploitation. On peut penser qu'une organisation qui vise à "imposer le retour du socialisme sur le devant de la scène politique" s'efforcerait d'utiliser la tribune électorale pour exprimer les aspirations du monde du travail et la nécessité de s'engager sur la voie de la lutte sur la base d'un programme d'objectifs susceptibles de répondre aux problèmes auxquels il est confronté.

Pourtant la plate-forme électorale du SSP ne contient rien de tout cela. Elle ne comprend qu'une petite section consacrée à la condition ouvrière, intitulée Industrie et formation, comme si le SSP avait craint de rebuter l'électorat en affirmant que la classe ouvrière existe et qu'elle a des intérêts à défendre. Qui plus est, cette section ne contient que quatre des "100 mesures pour une Ecosse socialiste" proposées par le SSP et encore deux d'entre elles expriment-elles des revendications propres aux appareils syndicaux. C'est dire que les préoccupations de la classe ouvrière n'ont pas une place bien grande dans celles du SSP.

Pour le reste, cette plate-forme électorale se résume à l'habituel catalogue de revendications tous azimuts, jusqu'à et y compris des revendications de caractère franchement réactionnaire telles que "l'abolition des essais sur les animaux dans le domaine de la recherche médicale et cosmétique" ce qui en dit long sur les concessions que le SSP est prêt à faire pour plaire aux défenseurs des "droits des animaux". D'autres revendications peuvent paraître très radicales. Par exemple, "l'expropriation des biens y compris des usines, bureaux et équipement des multinationales qui quittent l'Ecosse pour aller chercher une main-d'oeuvre à meilleur marché et de plus gros profits ailleurs". Mais on n'y trouve pas un mot sur les entreprises richissimes qui viennent chercher de la main-d'oeuvre bon marché en Ecosse et y restent tout en supprimant des emplois par milliers pour augmenter leurs profits comme la Royal Bank of Scotland, le géant de l'acier Corus, le groupe aéronautique et militaire BAe ou la compagnie du téléphone British Telecom, pour ne citer que ces exemples. Il faut croire que le SSP a considéré qu'il serait mal vu de viser ces compagnies, qui contribuent à mettre du beurre dans les épinards de la petite bourgeoisie et des PME écossaises, en leur laissant une part de la plus-value produite par la classe ouvrière locale.

Mais ce qui est sans doute le plus frappant dans cette plate-forme électorale, c'est de voir à quel point le SSP se place entièrement dans le cadre des institutions parlementaires écossaises. D'un côté, il y est dit que "nous ne prétendons pas que cette plate-forme puisse être mise en application dans son ensemble sans un combat politique de grande ampleur avec Westminster et les milieux d'affaires écossais. Mais qu'on ne s'y trompe pas, le SSP est prêt à s'engager dans un tel combat". Mais de l'autre, il y est dit également que " toutes les mesures incluses dans la présente plate-forme sont compatibles avec les pouvoirs dont est investi le parlement écossais". Mais c'est pour conclure, en montrant ainsi la vraie nature de sa politique, que "du fait du nouveau système électoral et particulièrement de la probabilité d'un parlement sans majorité le SSP pourrait se trouver en position d'y jouer un rôle d'arbitre. (...) Les négociations que nous engagerons alors ne viseront pas à nous assurer des postes ministériels mais à obtenir des mesures socialiste radicales destinées à mettre fin à des injustices et des iniquités de la société actuelle". En fait de "combat politique de grande ampleur", le seul terrain sur lequel le SSP envisage finalement de mener bataille se révèle être... l'enceinte parlementaire, par le biais de négociations de couloirs !

Le socialisme du SSP n'apparaît finalement que comme une version du vieux "socialisme parlementaire" travailliste, agrémentée de formulations plus ou moins radicales et d'oripeaux nationalistes qui le sont beaucoup moins rien à voir, en tout cas, avec le socialisme de Marx et de Trotsky.

Un réformisme en kilt

Le nationalisme du SSP est en effet sans ambiguïté. Ses statuts disent par exemple que "le SSP fera campagne pour une Ecosse indépendante et socialiste avec le but d'instaurer une république socialiste écossaise au sein d'une alliance plus large d'Etats socialistes démocratiques". On ne peut que se demander à quels "Etats socialistes démocratiques" il est fait référence. Cuba pourrait être l'un d'entre eux, à en juger par le fait que son ambassadeur était l'hôte d'honneur de la dernière conférence du SSP. Auquel cas, cela en dit long, une fois de plus, sur la conception qu'a le SSP du socialisme. Quoi qu'il en soit, au vu de la citation ci-dessus, on peut voir qu'entre les concessions honteuses au nationalisme écossais de Scottish Militant Labour en 1992 et la position ouvertement nationaliste d'aujourd'hui, bien du chemin a été parcouru par ces camarades, jusqu'à la capitulation pure et simple devant ce nationalisme qu'ils prétendaient vouloir combattre.

Car le fait d'insérer le mot "socialiste" à côté de la revendication d'une "Ecosse indépendante" ne change rien aux faits. Marx et Engels n'ont jamais conçu le socialisme autrement qu'à l'échelle du monde, certainement pas à l'échelle d'un seul pays et encore moins d'une région comme l'Ecosse. Il fallut la dégénérescence réformiste de la Deuxième internationale, puis la dégénérescence stalinienne de la Troisième, pour produire pareil travesti nationaliste du socialisme. Et le pire, c'est que ce sont des militants issus d'un courant qui, du vivant de Trotsky, a combattu ces distorsions du marxisme dans les pires conditions, qui les reprennent aujourd'hui à leur compte au sein du SSP !

Le respect du SSP pour le parlement écossais ne fait que refléter l'objectif qu'il s'est assigné et dont il ne se cache guère celui de prendre la place du Parti National Ecossais sur l'échiquier politique local en se lançant dans une OPA sur le milieu qu'il influence et cela non pas sur la base d'un programme "socialiste", mais sur la base de ce mélange de démagogie populiste et de réformisme petit-bourgeois caractéristique du Parti National Ecossais.

D'où, par exemple, cette interview affligeante publiée par l'hebdomadaire The Observer le 13 août, dans laquelle Tommy Sheridan expliquait que, sur la base des sondages, le SSP pourrait remporter 8 à 10 sièges aux prochaines élections du parlement écossais (contre un seul aujourd'hui, occupé par Sheridan). Et il ajoutait : "Il se pourrait que le Parti National Ecossais cherche à former un gouvernement avec quelques-uns des plus petits partis. Dans ce cas, nous exigerions que nos revendications redistributives soient mises à l'ordre du jour. C'est le prix que le Parti National Ecossais aurait à payer. Je ne sais pas s'il y sera prêt, mais nous ne serons pas des négociateurs faciles. Nous ne voulons pas du pouvoir pour le pouvoir". Bien sûr, Sheridan sait fort bien que le Parti National Ecossais, en parti responsable vis-à-vis de la bourgeoisie, n'acceptera jamais de mettre en oeuvre les revendications redistributives en question. Mais cela n'empêche pas Sheridan de ne pas exclure la possibilité de négociations en vue d'une participation gouvernementale du SSP, comme s'il pouvait y avoir quelque chose à négocier. A se demander ce qu'il faudrait pour que le SSP s'embarque dans la galère gouvernementale aux côtés du Parti National Ecossais quelques promesses aussi vagues que creuses ? Mais évidemment affirmer par avance qu'il n'est pas question pour le SSP de s'allier avec le Parti National Ecossais, voire qu'il n'est pas question de participer à un gouvernement bourgeois, ce serait tourner le dos aux nationalistes qu'il courtise.

Le SSP et le problème du parti révolutionnaire

Si l'extrême gauche britannique a salué le SSP comme un succès, c'est essentiellement du fait de ses résultats électoraux l'élection de Tommy Sheridan au parlement écossais en 1999 grâce au mode de scrutin proportionnel, et par la suite une série de résultats plus modestes mais non négligeables lors d'élections législatives partielles (par exemple, 9,7 % à Hamilton South ou 4,2 % à Ayr).

En termes d'effectifs, néanmoins, le SSP semble avoir rencontré moins de succès. Il revendique aujourd'hui 2 000 membres et plus de 40 sections, mais ses propres militants estiment qu'un quart au plus de ces membres sont actifs. Cela fait quand même du SSP une organisation de taille significative par rapport à la population écossaise, mais rien qui s'approche du "parti de masse du socialisme en Ecosse" qu'avait prédit l'un des dirigeants du SSP après l'élection de Tommy Sheridan. Sur le plan des luttes sociales, le bilan du SSP est tout aussi modeste puisqu'il n'est encore apparu à la tête d'aucun mouvement important depuis sa formation. L'essentiel de ses activités reste limité, tout comme pour le reste de l'extrême gauche, à des campagnes sur des thèmes divers et variés et parfois totalement étrangers aux préoccupations des travailleurs comme par exemple sa campagne pour la légalisation du cannabis ou encore pour l'abolition de l'article de loi qui interdit de parler de l'homosexualité dans les écoles.

Mais ce qui est plus décisif, ce sont les bases sur lesquelles le SSP a été bâti celles du réformisme et du nationalisme. Or c'est là le résultat de huit années d'activité de la part des militants qui quittèrent le Parti Travailliste en 1992 pour former Scottish Militant Labour. Ces camarades n'ont pas choisi de se servir du crédit qu'ils avaient gagné au cours de la lutte contre le "poll tax" pour avancer dans la construction d'une organisation révolutionnaire. Ils s'en sont servis pour construire une organisation réformiste.

Cela peut n'avoir guère de conséquences pour l'avenir si l'influence du SSP reste ce qu'elle est aujourd'hui. Mais s'il se développe, comme ses fondateurs et dirigeants l'espèrent, il ne fera qu'offrir un deuxième souffle au réformisme, à un moment où le réformisme du Parti Travailliste est frappé d'un discrédit sans précédent, du fait de la politique de Blair au gouvernement. Dans ce cas, une génération de militants révolutionnaires aura dilapidé le crédit qu'elle avait acquis dans la classe ouvrière écossaise pour, finalement, replâtrer la façade du réformisme.

L'essentiel de l'extrême gauche écossaise a maintenant rejoint le SSP, de façon organisée ou individuelle. D'après le SSP, même le SWP qui était le seul groupe d'extrême gauche de taille non négligeable à rester hors du SSP a maintenant ouvert des négociations en vue de l'admission de ses membres sous une forme ou une autre. Dans le reste de la Grande-Bretagne, le succès électoral du SSP a suscité tant d'enthousiasme dans l'extrême gauche qu'on en parle comme d'un "modèle d'unité" des révolutionnaires et comme de l'illustration de ce que cette "unité" pourrait permettre en Angleterre.

Mais cette unité une unité qui a d'ailleurs un but exclusivement électoral doit-elle être réalisée au prix de l'abandon du programme révolutionnaire, comme l'ont fait les militants trotskystes qui animent le SSP ? Et en quoi une telle unité peut-elle aider les révolutionnaires à résoudre le problème de la construction du parti révolutionnaire ?

Le fait que, en Ecosse, la plupart des groupes révolutionnaires sont désormais immergés dans le SSP ne signifie pas qu'ils peuvent se servir de sa relative influence pour défendre le programme révolutionnaire. Il signifie qu'ils offrent au SSP l'énergie de leurs militants pour augmenter l'audience et le crédit de sa politique nationale-réformiste.

Ce n'est certainement pas un pas en avant sur la voie de la construction d'un parti ouvrier révolutionnaire. C'est un recul et une façon d'abandonner le terrain de la classe ouvrière.