Bulletin d'usine pour les ouvriers de l'Usine de la Baltique
L'EFFONDREMENT DE (L'ÉTAT DE) LA BUREAUCRATIE
Les problèmes que l'accélération de la crise économique fait apparaître en surface provoquent de plus en plus de conflits dans les sommets. Il n'y a aucune unité dans aucune fraction de la bureaucratie. Le nombre des transfuges d'un camp politique à l'autre augmente. Les accusations mutuelles de corruption jaillissent comme d'une corne d'abondance. Un vice-président, des vice-premiers ministres, des titulaires de ministères-clé, au même moment, se sont retrouvés au centre d'énormes scandales politiques. Comme résultat des affrontements bureaucratiques, les fondements du pouvoir central s'en trouvent détruits. La hiérarchisation traditionnelle de la nomenklatura "de haut en bas" et la subordination des "étages inférieurs" aux "supérieurs" sont tombées en morceaux.
De toute sa voix s'est alors fait entendre une "troisième force" dans la lutte entre les deux branches du pouvoir fédéral : le séparatisme des élites régionales. Et ont été proclamées la république de Vologda, celle de l'Angaro-Iénisséïsk, celle de l'Oural ; à St-Pétersbourg, le Soviet restreint a introduit, lors du référendum d'avril, une question sur l'attribution du statut de république souveraine à la région de Léningrad.
Raisons de cet effondrement
Les médias officiels affirment : "la division national-territoriale de la Fédération Russe, c'est une mine explosive théorique située sous les pieds du pays". Bêtises ! Le pacte fédéral n'est rien d'autre qu'un bout de papier. La vraie "mine" explosive, c'est la crise du système bureaucratique. La nomenklatura économique a vidé les caisses de l'État. Le centre ne donne plus de dotations aux régions. La périphérie répond en retenant les impôts. Par exemple, le gouverneur de Krasnoïarsk, Zoubov, a décidé de retenir en "compensation" une partie des impôts fédéraux. Mais cela a atterri dans quelles poches ? Sûrement pas dans celles de la population. L'autonomie vis-à-vis du centre permet aux échelons moyens de la bureaucratie de porter à des dimensions phénoménales la corruption et le pillage du budget public. Par suite de l'effondrement de l'appareil d'État, le système traditionnel de la nomenklatura a disparu, un système dans lequel c'était le centre qui effectuait les nominations. Mais la taille, le nombre de la nomenklatura locale n'en augmentent pas moins. En effet, le vieux système des nominations "de haut en bas" supposait ne serait-ce qu'un certain tri des apprentis bureaucrates ; aujourd'hui, on le voit bien, ce qui se renforce c'est le système du copinage et du clientélisme familial.
La démagogie politique des "roitelets isolés" s'appuie sur une démagogie économique. Ces beaux parleurs de province font un tableau flatteur des "enchantements" de l'économie de marché et des "avantages" de la privatisation. Mais dans la réalité, l'arbitraire des bureaucrates brise les forces productrices du pays. 95 % de l'économie russe se trouvent entre les mains de l'État. Mais l'appareil d'État s'est brisé. Du coup, chaque clan de la bureaucratie s'efforce d'élargir son pouvoir économique et de renforcer son pouvoir politique. Et d'établir son contrôle complet sur les usines et sources de matières premières, et de... piller, piller, piller. La bureaucratie industrielle a également obtenu un degré certain d'autonomie et s'enrichit à merveille sur le dos des ouvriers. Les anciens liens économiques se brisent, la chute de la production s'aggrave.
Ceux qui mettront un terme à la crise
La seule force qui a les moyens d'en finir avec la crise et de rétablir l'unité du pays sur une base vraiment démocratique, c'est la classe ouvrière. Les premiers pas de la lutte ouvrière nous les voyons. Font grève les ouvriers du Bachkorostan et de la Province maritime, les mineurs du Kouzbass et de Vorkouta. La résistance des travailleurs est aussi en augmentation dans les autres républiques. En juin, une grève générale en Ukraine a fait trembler le gouvernement de Kravtchouk et Compagnie. Les mineurs du Donbass, encore une fois, étaient à la pointe de la lutte ! En Moldavie, en août, ce sont les cheminots qui ont fait grève. Et il n'y a eu que la prise de mesures policières draconiennes par le gouvernement pour forcer les cheminots à interrompre leur grève. Les ouvriers doivent s'organiser et ne laisser à aucune sorte de démagogues le loisir de venir parasiter les luttes ouvrières. La lutte ouvrière, c'est la lutte contre le système au pouvoir.
INFORMATIONS DE L'USINE
"Multicapital" : d'où cela vient et qu'est-ce que cela veut ?
Fin août, sur le site de l'Usine de la Baltique a surgi la société "Multicapital". Cette entreprise rachète aux ouvriers leurs actions à 40 000 roubles pièce. C'est la direction qui a insisté pour transformer l'usine en "société par actions". Or, le rachat d'actions par "Multicapital" se fait sous la tutelle de la direction. Jusqu'à maintenant, le directeur de l'usine Chtchouliakovski se déplaçait en Volga noire (NdT : LA voiture de la bureaucratie traditionnelle). Bientôt, va-t-on le voir au volant d'une Mercédès blanche ?
Qui reçoit un salaire et pour quoi ?
A l'atelier No3 (atelier de coulée des métaux non-ferreux), la santé des travailleurs se trouve menacée en permanence. L'équipement est archi-usé et depuis bien longtemps. Et cela n'a pas l'air d'inquiéter la direction ! Les décoffreurs d'hélices sont forcés de travailler avec des marteaux pneumatiques qui ont déjà 20 ans d'âge. Le risque d'être atteint par des maladies dues aux vibrations n'est pas mince ! Les mouleurs et les fondeurs doivent travailler sans dispositif anti-gaz et sans aspirateur-respirateur "à pétale". Les empoisonnements à l'oxyde de zinc et les cas de silicose ne sont pas rares. Manque de lunettes de protection, et ce sont les yeux qui en prennent un coup. La situation du côté des habits spéciaux est catastrophique ! Les fondeurs et les mouleurs usent une paire de mitaines de protection par poste. Mais les mitaines ne leur sont données qu'une fois seulement par mois ! Quant au tablier qui est remis, il ne protège pas des brûlures et ne convient pas pour un travail en feux continus. On aimerait savoir : quel travail du sous-directeur à la sécurité, Selivonietz, peut bien justifier qu'il reçoive un salaire ?